Cinq questions à Hervé Servat, Directeur adjoint de la DDTM de Gironde


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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 17/03/2016 PAR Solène MÉRIC

@qui ! : En Gironde, la CDCEA a été installée en 2011 et remplacée par la CDPENAF en septembre 2015. Pourquoi un tel changement ?
Hervé Servat :
Le législateur a dû estimer que la CDCEA, qui ciblait les espaces agricoles, avait plutôt bien fonctionné. Et lorsque la loi d’avenir a été votée en 2014, il a choisi d’étendre les prérogatives de la CDCEA, à l’ensemble des espaces, agricoles, naturels et forestiers en créant les CDPENAF. Un choix logique, car ces espaces sont en interactions : les espaces naturels peuvent devenir agricoles ou forestiers et vice versa. Donc désormais on prend en compte l’ensemble de ces espaces face à une artificialisation.

@ ! : Quel est le rôle de cette commission et qui la compose ?
H.S:
La Commission se réunit une fois par mois, et a pour rôle d’émettre des avis auprès des collectivités qui s’apprêtent à approuver leurs documents d’urbanisme, mais aussi auprès des collectivités et de l’État, sur des décisions individuelles, tels que les permis de construire.
Présidée par le Préfet, elle compte une vingtaine de membres représentant les collectivités, les services de l’État, les organisations professionnelles agricoles, les associations de protection de la nature, qui sont là depuis l’origine, et, depuis la CDPENAF, les représentants du monde forestier, publics et privés. La loi d’avenir a aussi « officialisé » la présence de la Safer en tant que membre avec voix consultative. La Safer a la connaissance du foncier rural, et assez souvent, de l’historique des dossiers. Son éclairage permet aussi de ne pas être simplement sur le quantitatif des hectares ouverts à l’urbanisation, mais aussi dans le qualitatif.

@ ! : Quelle est la valeur des avis rendus ?
H.S:
Cela dépend. Les avis sur les documents d’urbanisme sont des avis consultatifs. Les avis sur les décisions individuelles sont pour certains consultatifs, et pour d’autres, ce sont des avis conformes au sens où si la commission émet un avis défavorable, le Maire ou l’État ne pourront pas délivrer un permis de construire. De nombreux permis de construire ou de changements de destination en zones agricoles sont donc bloqués parce que la CDPENAF a émis un avis défavorable au regard de leur impact en terme de mitage, ou de proximité d’activités agricoles qui seraient remises en question.
S’agissant des documents d’urbanisme, c’est un peu plus compliqué. Je pense par exemple à une commune du Libournais qui avait reçu un avis défavorable sur sa première version de PLU qui a choisi de le retravailler, puis de le représenter à la Commission pour répondre aux différentes observations émises et, cette fois, obtenir un avis favorable avec une réduction des surfaces ouvertes à l’urbanisation. Autre exemple sur une carte communale en Médoc, la Commission avait pointé une zone ouverte à l’urbanisation dans les vignes qui ne lui semblait pas justifiée. Il n’y a pas eu de nouveau passage devant la commission, mais cette ouverture à l’urbanisation a tout de même été retirée du projet.

« Je tire un bilan positif du fonctionnement de ces Commissions »
@ ! : Comment se déroulent les débats au sein de la Commission ?
H.S:
S’agissant des documents d’urbanisme, les débats portent tout d’abord sur une analyse quantitative du projet de la commune. L’idée est de ne pas avoir des ambitions d’ouverture à l’urbanisation qui ne soient pas en phase avec les perspectives démographiques de la commune. Deuxième point, nous examinons où se situent les ouvertures à l’urbanisation. La volonté de la commission c’est qu’elles se soient prioritairement dans des zones déjà artificialisées ou dans des dents creuses existantes et, secondairement, vers les espaces agricoles, naturels et forestiers. Ensuite on examine l’aspect qualitatif : quelles sont les parcelles concernées, quel impact sur les milieux naturels ou sur l’agriculture qui se situe autour.
Cette « grille de lecture » a permis à la commission d’affiner ses avis et d’éviter sa tendance initiale à émettre beaucoup d’avis défavorables sur les documents d’urbanisme, ce qui était très mal perçu par les collectivités. Désormais, plutôt qu’émettre un avis défavorable, on préfère cibler sur les réserves fortes. Il ne s’agit pas de remettre en cause les projets des collectivités issus d’une volonté politique, mais de soulever les points de difficulté qui nécessiteraient d’être revus pour permettre l’obtention d’un avis favorable.

@ ! : La CDPENAF n’existe que depuis quelques mois, quel recul avez-vous par rapport à ce qu’elle a apporté ?
H.S:
En Gironde, la CDPENAF est trop jeune pour avoir réellement eu l’occasion de traiter de dossiers ayant un impact sur la forêt. Par contre avec le recul de la CDCDEA je tire un bilan positif du fonctionnement de ces Commissions. Nous avons des membres assidus qui ont appris à se parler et à se comprendre ! On n’a plus de posture avec des positions de principe qui seraient défendues, mais un examen constructif de chaque dossier, qui permet petit à petit de forger une doctrine commune, permettant d’être cohérent dans nos avis, dont beaucoup sont émis à une large majorité, voire à l’unanimité. Ils sont mieux argumentés, donc mieux perçus par les collectivités qui en sont destinataires, notamment sur les documents d’urbanisme. Et la conséquence, c’est que des évolutions se font jour à la fois sur la qualité des dossiers présentés, et sur le résultat final.

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