« Du beau monde » ou 50 ans de madeleines littéraires du côté de chez Olivier Mony


Isabelle Camus

"Du beau monde" ou 50 ans de madeleines littéraires du côté de chez Olivier Mony

Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
Temps de lecture 3 min

Publication PUBLIÉ LE 10/06/2011 PAR Isabelle Camus

« Longtemps, je me suis couché de bonne heure », déclarait Swann sous la plume de Marcel Proust. « Longtemps j’ai été vieux » débute Olivier Mony sous la sienne. Entre les deux, la recherche du temps perdu, l’évocation d’un temps passé qui fleure la même nostalgie. Après Un dimanche avec Garbo et ses figures de passage pour un temps dans le Sud-Ouest, » d’Hemingway à Chantaco, de Jean Cocteau sur le Bassin d’Arcachon ou de Téchiné à Biarritz », Olivier Mony persiste et signe (et c’est tant mieux), aux éditions Le Festin, un deuxième ouvrage. Une fois de plus, on y croise Du beau monde, (déjà chroniqué dans Nos lectures du week-end), mélange de textes inédits et de chroniques publiées par le « journaliste écrivant », comme il se définit lui-même. Un pêle-mêle de promenades dans un univers qui le dispute au littéraire, au cinéma et au musical, avec Bordeaux et la côte basque en toile de fond.

Des geEric Puech lit le Camus d'Olivier Mony 50 ans de Beau Monde au Café de l'Opéra de Bordeauxns et des territoires
S’il est une figure parmi toutes les autres à avoir marqué Olivier Mony, c’est bien Albert Camus. « Une belle plume pour un auteur pied-noir qui ressemble à Humphrey Bogard. Un personnage bouleversant de complexité, dont l’Etranger est, pour moi, un des romans les plus beaux de notre littérature ». Un Camus dont on apprendra qu’il était fasciné par St Jean-de-Luz, hâvre de paix méconnu, abri de ses dernières amours avec  Mi. Du beau monde c’est tout ça. Une somme de personnages, de rencontres avec des gens mais aussi avec des territoires, des ambiances, des atmosphères qui ont donné envie à Xavier Rosan, sensible aux mêmes thèmes, d’éditer celui qu’il lit et connait depuis 40 ans. « Une grande plume et un grand lecteur, qui sait faire passer sa passion de manière fluide et amène à aimer la littérature ». Un don qui, avec Mony, échappe aux clichés habituels : »Je n’ai pas de plaisir à écrire, mon plaisir est plus celui procuré au lecteur ou de vous rencontrer pour faire le mariol. J’adore avoir écrit, mais, sans vouloir faire de provoc, on est pas toujours visité par la grâce. »

Le Bordeaux de Mony
Autre époque, autre rencontre, autre anecdote, celle de la fuite de Patrick Modiano qui quittera son père sur les marches du Grand Théâtre de Bordeaux (devenu Opéra) pour ne plus jamais le revoir. Evocation, in situ, pleine de sel pour celui définissant l’auteur comme « quelqu’un qui pose un regard différent sur quelque chose qu’on croit connaître ». Et la vision de Mony sur Bordeaux vaut son pesant de souvenirs  cafardeux :  » Bordeaux a longtemps été tout, sauf au bord de l’eau. Mon Bordeaux est triste et gris, profondément réac, extraordinairement peureux et provincial, peuplé de veaux sans spiritualité… On  parle peu de ce Bordeaux au temps des croque-madames, du Grand Café et du Drugstore, à l’époque où Bordeaux croyait à la modernité, voir le Mériadeck de Chaban. Une manière presque naïve que je ne retrouve pas dans le Bordeaux d’aujourd’hui. J’ai toujours trouvé la ville magnifique, mais derrière les façades, il se passe des choses ».

Le temps des premiers émois
Après la solitude d’une enfance trop sage passée dans les bibilothèques, le ton devient facétieux, presque cabotin pour parler des premiers émois, décelera Eric Puech. « Tu me prêtes un hédonisme inconnu de moi », plaisante le principal intéressé. L’époque du slow (et sa disparition),  du disco (et l’apparition du sida) a surtout marqué « une adolescence sous le signe du rateau, où tout le monde se souvient des dizaines de soirées dans lesquelles on labourait consciencieusement les lombaires d’une partenaire non choisie ». Du beau monde ne prétend pas révolutionner ce qui se sait déjà –  on y apprend malgré tout beaucoup – mais aspire juste à trouver le petit regard en biais qui, même s’il est connu,  permet de découvrir des choses sous un angle nouveau. Confidences d’un auteur qui mêle sa propre histoire à celles des destinées illustres, pleines de peines, d’artifices, de gloires et de fins tragiques que sont celles de Jean Seberg, Françoise Sagan, Gérard Philipe, Luis Mariano mais aussi Moravia, Cocteau, Truffaut…

Après les années 40 et 50, Olivier Mony envisage de revenir sur les traces du Bordeaux des années 60, sous la forme, cette fois-ci, d’un roman. Le « journaliste écrivant » semble prêt à devenir écrivain.

Du beau monde : 160 pages – 17 € – Éditions Le Festin – Collection Les Cahiers de l’Éveilleur

Photo : IC

Isabelle Camus

Partagez l'article !
Copier le lien Partager sur FaceBook Partager sur Twitter Partager sur Linkedin Imprimer
Laissez vos commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

On en parle ! Gironde
À lire ! CULTURE > Nos derniers articles