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L'ÉDITO

 par Cyrille Pitois Cyrille Pitois
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12/01/2023

Derrière le coup de com, enfin du vrai changement ?

Le début de l’année est la période de l’échange des vœux et le temps de l’affichage des bonnes résolutions, que l’on pourrait dupliquer d’une année sur l’autre, tant leur mise en œuvre reste difficile face au poids des habitudes ou à l’inertie de nos organisations que nous imaginons complexes.

Pourtant deux entreprises ont profité de cette rentrée de janvier pour se lancer un nouveau défi, et s’engager sur la place publique. Le géant de l’assurance mutualiste, MAIF dans le siège est à Niort (Deux-Sèvres) et le Crédit mutuel prennent l’engagement d’un dividende sociétal. La banque va mobiliser chaque année 15% de son résultat soit environ 500 millions par an pour financer des projets qui favorisent un monde plus durable et plus solidaire.  L’assureur de son côté, s’engage sur une option similaire : 10% de son résultat net soit environ 10 millions d’euros par an seront redirigés vers la planète.

Les deux acteurs n’ont pas manqué de soigneusement communiquer sur ces nouvelles politiques affichées, allant jusqu’à reprendre le mot de dividende, qui désigne habituellement ce que l’actionnaire perçoit quand tout est fini dans l’exercice comptable de l’entreprise, et qui lui permet de garnir son portefeuille personnel sans avoir réellement transpiré.

En donnant une destination sociétale ou écologique à ce dividende, on lui redonne une respectabilité et une mission que le capitalisme de papa lui avait quelque peu dérobées. L’autre question, c’est l’affectation de ces dividendes précédemment. Ces millions d’euros existaient peu ou prou dans les bilans des précédentes exercices. Leur affectation n’était pas fléchée de façon aussi claire. Mais on espère quand même qu’ils ne finançaient pas le travail des enfants dans des mines ou la fabrication d’armes anti-personnelles !

Ne soyons donc pas naïfs : ces annonces de début d’année revêtent sans doute une part d’habillage qui consiste à renommer ou à mieux ranger des actions qui existaient déjà dans ces institutions où la dimension humaine ne date heureusement pas d’hier. Leur communication y fait d’ailleurs sans arrêt référence.

L’autre aspect technique, c’est que ces entreprises peuvent afficher des orientations politiques nouvelles relativement facilement. Ce sont des fédérations mutualistes. Il n’y a pas dans leur statut l’obligatoire  rémunération des actionnaires et elles sont donc beaucoup plus agiles pour orchestrer des changements de caps signifiants.

Dernier point de décryptage. Qu’un assureur finance des actions pour prévenir le risque climatique, c’est juste la bonne façon de bien faire son travail. En réduisant le risque encouru par ses assurés, il réduit logiquement leur exposition au risque et donc son obligation de les indemniser.

Donc les deux institutions, en livrant ces annonces font d’abord la preuve que face à l’évolution du risque et des besoins de leurs clients, elles prennent des mesures qui vont dans le sens d’une bonne anticipation de l’évolution de leur activité. Elles communiquent sur une orientation vertueuse qui s’imposera à elle au fur et à mesure que la révolution climatique et sociétale s’imposera davantage.

Mais il y a pour autant matière à se réjouir de ces décisions. D’abord ces entreprises ont décidé de les afficher donc de prendre une forme d’engagement irréversible. Ensuite, elles sont les premières à monter sur le podium de la communication en affichant des objectifs, en publiant des chiffres précis, en impliquant toute leur chaine de valeur. Plus qu’une résolution, on sent ici poindre une stratégie quand d’autres se replient derrière les coups de semonce de la pandémie ou des incendies majeurs de 2022 pour surseoir une nouvelle fois au changement de paradigme que la protection de la planète nous impose.

En orientant la boussole autrement, en inventant les dividendes vertueux, ces entreprises montrent qu’un pivot est peut-être en train d’être franchi. D’autres vont s’attacher à les suivre ou les dépasser dans la course aux bonnes idées. Elles bousculent les codes de leurs métiers. Et rien que pour ça, leur engagement pèse plus qu’un coup de com.

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