Une nouvelle identité pour Mérignac


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Une nouvelle identité pour Mérignac

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 11/05/2017 PAR Romain Béteille

Les premières éditions d’un festival sont toujours tâtonnantes, on ne sait pas vraiment quel public on va toucher ni quel thème préférer à un autre. Alors, forcément, on voit un peu plus large qu’un évènement réellement identifié. Mais, comme pour un artiste qui se lance, le réel défi n’est pas le premier album, c’est le deuxième. Pour sa seconde édition réelle (après une version zéro en 2014 et un lancement officiel en 2015), cette biennale de la photographie compte faire les choses bien, en faisant de réels choix artistiques autour d’un thème précis : l’identité et la communauté. C’est aussi bien le choix de la municipalité que du nouveau commissaire d’exposition à qui elle a donné carte blanche, François Cheval. L’ancien conservateur du musée de Châlon-sur-Saône et actuel co-fondateur du premier musée public de la photographie chinois ne mâche pas ses mots sur ce choix. « Nous ne sommes pas venus ici pour mettre une ligne de plus sur notre C.V », a-t-il commenté lors de la présentation de la programmation ce mercredi au Chateau Luchey-Halde. « Il y a une soixantaine d’autres festivals photo en France, on est obligé de rentrer dans un schéma concurrentiel ».

Dix expos, une ligne

« Pour cette deuxième édition, continue-t-il, on s’est demandé à quoi sert réellement un festival de photographie. On oublie parfois qu’il est avant tout fait pour les gens et que les commissaires d’exposition doivent s’effacer pour que les artistes et le public local puissent réellement se rencontrer. Pour pouvoir rendre les gens plus consicents, critiques et pas dépendants d’une vision qui leur serait imposée, pour aider les jeunes photographes et montrer des choses inconnues du grand public, on a souhaité créer de grandes maisons éphémères ». Ces structures seront au nombre de trois, situées dans le Parc de la Mairie et sur le parvis du Pin Galant. Elles permettront à la fois de rencontrer les artistes et de découvrir leurs oeuvres, souhaitant ainsi permettre une réelle interaction entre les photographies exposées et les visiteurs, qu’ils soient spécialistes ou néophytes. 

Bien évidemment, c’est moins cette forme un peu inédite que le contenu de la programmation qui va les attirer. Pour le remplir, les organisateurs du festival ont fait appel à des artistes assez rares en France. C’est notamment le cas d’Isabel Munoz, dont on verra une série sur les grands singes africains se questionnant sur les relations et les liens unissant l’être humain et le primate. Pour sa première exposition française, l’espagnole exposera à la Vieille Église, tout comme trois autres professionnels : Andrea Santolaya et ses clichés de la tribu Warao (Venezuela) et de leurs croyances, Jake Vernoza (Phlippines) et ses femmes tatouées du Kalinga (terme signifiant « hors la loi » et lié aux « chasseurs de têtes » offertes comme sacrifices humains dans la région de la chaîne des Cordillères), et la dernière série d’Anna Malagrida, « Cristal House », travail étonnant sur les mains et les « rituels du jeu », chaque cliché décrivant un geste particulier.

Le travail d’Eric Pickersgrill sur les communautés créatrices de « fake news » et de faux évènements aux États-Unis questionnent sur le rapport du public à l’information (à la médiathèque). Dans la première « grande maison », Joshua Benoliel dépeint les grandes manifestations et mouvements ouvriers du début du vingtième siècle au Portugal lorsqu’en face, l’artiste Meyer évoque de manière plus contemporaine la « nouvelle révolte » de Nuit Debout, prise pour beaucoup comme une nouvelle tribune d’expression. Au Krakatoa, Pierre Wetzel présentera un travail sur « 26 ans de musiques actuelles » via un procédé photographique très ancien, le Collodion humide sur plaques de verre. L’arthothèque de Pessac, elle, se concentrera sur des portraits de femmes et de leur représentation dans l’imaginaire collectif. De la communauté des Hells Angels suisses (oui, vous avez bien lu) aux habitants d’une ville écossaise ravagée par la crise économique, des passagers émigrés d’un « train vert » chinois effectuant un long voyage pour renter chez eux un 1er octobre (jour férié) à la vie d’un village rural breton par une artiste américaine : chaque thématique interpelle, interroge et rend curieux.

Un festival plus ouvert

Y compris dans son interactivité, le festival mérignacais essaye de ne rien faire comme les autres. Ainsi, en plus des projections (documentaires suivis de débats et travaux de collectifs de photographes), les « lectures de porfolios » permettront de proposer à des photographes amateurs de participer et de présenter leurs travaux à des professionnels dans l’auditorium de la médiathèque (les deux autres lectures, plus classiques, étant des tête à tête de vingt minutes avec un spécialiste). Les workshop (à des prix un peu moins importants qu’habituellement, une cinquantaine d’euros et vingt-cinq en tarif réduit, pour « rester abordable et accessible », nous dit-on), actions de médiations, créations communes de deux lycées et découverte des coulisses par des classes de collège ou encore nouvelle « soirée du festival » comprenant concert de projections dont le programme reste encore à définir : tout a visiblement été fait pour intéresser le plus grand nombre.

Si Vincent Perez et Bettina Rheims ne font pas partie de la liste des invités, Marion Motin (chorégraphe entre autres de Madonna, Stromae ou Christine and the Queens) sera en revanche bien présente lors de la soirée de gala du mercredi 4 octobre. Cette dernière a le même but que lors de la première édition : réunir public, artistes et partenaires privés ayant servi de mécènes et permis la tenue de cette manifestation culturelle, comme un palier de crowdfunding. Si leur liste n’est pas encore arrêtée, il leur faudra composer avec des ambitions à la hausse et un budget prévisionnel dépassant les 277 000 euros dont ils fourniront 64%, une hausse principalement due à une enveloppe artistique plus importante qu’auparavant. Il faut dire aussi que l’installation des expos est nécessairement longue. Pour les derniers retardataires, les expositions dureront jusqu’au 17 décembre prochain, même si un temps fort est identifié au mois d’octobre. L’édition 2015 avait réuni environ 11 650 spectateurs. Cette nouvelle identité, à la fois visuelle et morale, devrait sans doute permettre à la ville de voir un peu plus grand…

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