C’est ce qui s’appelle un « coup de gueule ». Réunis aujourd’hui à Saint-Médard-en-Jalles, une dizaine d’élus appartenant au groupe EELV Les Jalles (correspondant essentiellement aux communes appartenant à une zone nord-ouest de la métropole bordelaise) ont adressé une lettre ouverte aux maires de la zone dont Jacques Mangon, maire de Saint-Médard. Leur but : contester assez vigoureusement le projet d’extension de la ligne D entre Le Taillan et le centre de Saint-Médard, que le maire appelle de ses voeux depuis plusieurs mois à travers son collectif « Urgence, grande ligne D ». « C’est un projet grossier et ubuesque », affirme Jean-Alain Bouyssou, élu EELV du Haillan au sein de la majorité socialiste d’Andréa Kiss.
« Nous y sommes catégoriquement opposés. D’abord parce que cette construction s’effectuerait sur une zone classée Natura 2000. Ensuite parce qu’elle n’a pas lieu d’être puisqu’on ne juge la pertinence de la construction d’une nouvelle ligne que s’il y a 2500 voyageurs par heure et par sens minimum. Or, selon les préfigurations effectuées par Bordeaux Métropole, on n’envisage pas plus de 1100 voyageurs par heure sur le tronçon le plus chargé. Un tramway serait inefficace en zone périurbaine, pas du tout adapté, d’autant que Jacques Mangon avait qualifié le tram-train du Médoc de « ligne exotique »… », affirme l ‘élu vert.
Un bus comme solution
Le 15 décembre dernier, Jacques Mangon avait réuni à Sainte-Hélène plusieurs maires de communes du Médoc qui avaient décidé de rejoindre son collectif monté en 2014, fortement relayé par une pétition signée par plus de 4500 personnes. « Notre objectif, c’est de voir ce projet s’accélérer. Les intérêts de Saint-Médard et des communes du Médoc sont mêlés. L’aire urbaine, ce n’est pas uniquement la métropole. Cette extension pourrait transporter 4000 passagers par jour selon les prévisions, et on sait que la réalité les dépasse souvent », avait alors assuré le maire de Saint-Médard-en-Jalles. Si le BHNS (Bus à Haut Niveau de Service) a été acté par Bordeaux Métropole pour une mise en service d’ici 2017, il n’est qu’un « soin palliatif » pour le collectif formé par Jacques Mangon. Pour les élus verts en revanche, il est la solution aux problèmes de dessertes en transports en commun rencontrés par cette zone excentrée de la métropole.
« Le tram-bus va transporter 100 à 150 personnes à raison d’une cadence toutes les cinq minutes, contre vingt pour le tram. De plus, il va rouler sur une voie routière dédiée, en reliant les Quinconces à St-Aubin ». D’une longueur de 20 kilomètres, son tracé va coûter une centaine de millions d’euros, et les élus imaginent déjà un prolongement vers la Gare St-Jean. « Les 60 millions d’euros de l’extension de la ligne D seront jetés par les fenêtres, alors que l’on pourrait imaginer une renforcement de la ligne de bus, à raison de 5% par an sur 10 à 15 ans. Nous devons changer cette image ringarde du bus, comme lorsque Transcub a changé la vision qu’avaient les bordelais du tramway, au moment où la mairie de Bordeaux voulait installer un métro à Bordeaux », assure Jean-Alain Bouyssou.
Des propositions alternatives
Dans leur lettre ouverte, les élus verts font plusieurs proposition notables : desservir via le Tram’bus des quartiers de Saint-Médard, proposer une ligne circulaire en tram’bus partant du nord du Taillan-Médoc vers l’aéroport, créer des parkings relais en périphérie pour « capter les automobilistes » ou encore prolonger la ligne A du tram au moyen d’un Tram’bus. Sur ce dernier point, les élus du Haillan s’étaient prononcés à l’unanimité contre l’extension de la ligne D, qui, si elle est validée par Bordeaux Métropole, pourrait voir le jour au plus tôt en 2021.
Prochaine étape pour les élus du groupe EELV, faire entendre leurs voix. « Nous allons organiser une réunion publique entre la fin du mois de janvier et le mois de février pour informer la population ». Il pourrait se dérouler au Haillan en présence de plusieurs élus de bords politiques différents (le Front de Gauche, qui fait partie de la majorité municipale et PS notamment) et pourrait donner lieu à d’autres réunions publiques dans les mois qui viennent. Quant-à l’idée de monter un collectif, « nous le souhaitons, mais l’initiative ne viendra pas de nous », catégorise l’un des porte-parole. C’est qu’il faudra combattre la « Quinzaine de la Grande Ligne D » annoncée à Saint-Médard pour ce début d’année. « Les lignes de tramway sont pour la plupart des lignes politiciennes », rétorque l’élu vert du Haillan. La guerre des clochers semble bien vouloir durer…