Pourtant, depuis maintenant quelques décennies, après les mesures libératoires de la démocratie de proximité prises par Gaston Deferre, les attaques se succèdent pour revenir sur cette liberté donnée par des élu(e)s à d’autres élu(e)s de gérer au plus près de leurs mandants, les collectivités territoriales, afin d’améliorer la vie quotidienne de toutes les Françaises et les Français. En fait le texte constitutionnel est sans ambiguïté : «les collectivités territoriales de la République sont les communes, les départements, les régions, les collectivités à statut particulier et les collectivités d’outre-mer (…). Les collectivités territoriales ont vocation à prendre les décisions pour l’ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en œuvre à leur échelon Dans les conditions prévues par la loi, ces collectivités s’administrent librement par des conseils élus et disposent d’un pouvoir réglementaire pour l’exercice de leurs compétences(…) ». Clair net et précis mais sans cesse bafoué par des artifices légaux.
« Revenir sur la décentralisation »
Faute de pouvoir détruire par une réforme constitutionnelle (le Sénat ne l’acceptera jamais) ces principes fondateurs de la République, les Présidents successifs depuis 1998 ont tenté, sous l’influence de la caste technocratique dépossédée d’un pouvoir qu’elle considère comme relevant de sa compétence et de ses prérogatives, de revenir par divers artifices sur le décentralisation. Elles est revenue au pouvoir dans le sillage du Président. Le prétexte reste toujours le même et a été médiatisé sous une formule absurde et irréelle : le mille-feuille qui coûterait un pognon de dingue au pays. Or il n’existe pas sauf à vouloir refuser de considérer que les communes et les départements doivent disparaître au profit de structures artificielles qui ne relèvent pas de l’article 72 de la Constitution. Les Lois MAPATAM et NOTRé sont allées dans ce sens.
La fusion des régions n’a provoqué aucune économie (bien au contraire) ; la nouvelle répartition des compétences a constitué un écheveau inextricable de conventions, délégations, transferts qui la rend totalement illisible ; la marche forcée vers une intercommunalité réputée plus efficace a eu comme conséquence de couper encore plus les liens déjà distendus entre la cellule de base communale et l’usage citoyen. Aucun rapport de la Cour des comptes n’atteste de l’efficacité de ces décisions gouvernementales unilatérales antérieures.
Incapable de redresser ses finances, l’État veut sous l’impulsion de Bercy reprendre de fait le contrôle des collectivités locales constitutionnelles dégageant de l’autofinancement et globalement peu endettées. Après s’être appliqué à les étrangler financièrement (le reste à charge de la solidarité humaine des départements non pris en compte ou la limitation sans aucune concertation de leurs dépenses sur un taux inférieur à l’inflation) ou à les priver de leur libre gestion (mise en place de la perte de leur libre gestion par le système fallacieux des dotations compensatoires illusoires) il franchit une nouvelle étape avec l’annonce de la métropolisation de certains départements qui n’est qu’un ballon d’essai pour la suppression d’une trentaine de ces derniers.
« Une logique financière pure et dure »
Cette annonce présidentielle à l’issue d’une entrevue entre « copains » s’inscrit dans une logique financière pure et dure portée par les « intouchables » de Bercy, afin de resserrer leur emprise sur la gestion des « grandes » collectivités (région parisienne, marseillaise puis les ex-communautés urbaines). Il s’agit surtout de détruire le dernier réseau de ces élu(e)s de proximité considérés comme des Gaulois arriérés et récalcitrants.
La « fusion-absorption » annoncée en Gironde sans aucune concertation, sans aucune étude sérieuse sur son impact (la métropole est-elle prête à absorber plus de 300 millions de dépenses sociales non compensées sur son territoire?) relève du fait du Prince méprisant à l’égard de celles et ceux qui symbolisent par leur action quotidienne (maires, conseiller(e)s départementaux) une République humaine, solidaire, citoyenne, équitable, durable et globalement soucieuse de l’intérêt général. Ils sont eux, au contact de la réalité tous les jours, des besoins, de cette disparité territoriale croissante que chaque réforme a accentuée, de cette précarité rurale ou urbaine grandissante ! C’est insupportable pour le gouvernement !
Collèges, routes, économie sociale et solidaire, environnement, mobilité partagée, insertion sociale et professionnelle, enfance en difficulté, autonomie, culture, sport, vie associative, haut débit pour tous : le Département ne cesse d’avancer, d’innover, de préserver grâce à une vision territoriale globale que la métropolisation veut fracturer financièrement, humainement, politiquement, matériellement et administrativement.
Le 13 octobre à 11 h en venant dans le hall de l’immeuble Gironde du conseil départemental de la Gironde bien plus que contre la « métropolisation » élus(e)s locaux, militants de toutes les structures associatives, citoyenne(ne)s et citoyens vous viendrez témoigner toutes et tous, de votre attachement lucide à une démocratie de proximité humaniste, solidaire efficace et solide qui ne peut être sacrifiée par un diktat autocratique et technocratique.
Jean-Marie Darmian, ancien Maire de Créon, ancien secrétaire général adjoint de l’Association des Maires de France, Vice-Président du conseil départemental chargé des Finances