Saft fait de Poitiers une capitale mondiale de l’électrolyte


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Saft fait de Poitiers une capitale mondiale de l’électrolyte

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Temps de lecture 6 min

Publication PUBLIÉ LE 21/10/2020 PAR Julien PRIVAT

Un bâtiment qui a poussé en à peine plus d’un an sur le site poitevin de Saft. La première pierre avait été posée en juillet 2019, annonçant déjà, à l’époque, un investissement important qui répond à une forte demande d’un marché en plein essor. Celui de l’Internet des Objets (en anglais Internet of Things qu’on retrouve souvent sous le sigle IoT). Il s’agit de la matérialisation d’Internet dans le monde réel. Cela concerne donc tous les objets, des voitures à ceux de la vie quotidienne, reliés à un réseau d’Internet. Ce qui leur permet de communiquer entre eux, de collecter et d’échanger des données. En résumé, c’est ce qu’on appelle les objets connectés.  

La production d’électrolyte va doubler

Retour à Poitiers, où un bâtiment de 1 900m2 a été inauguré le 7 octobre dernier. 9 millions d’euros d’investissement. Pour une ligne entièrement automatisée de fabrication d’électrolyte. Un composant situé dans le coeur même des batteries. « Une batterie, c’est très simple, il y a deux électrodes. Au milieu, il y a un liquide qu’on appelle l’électrolyte. Les ions vont d’une électrode à l’autre. La durée de vie, la puissance de la batterie, le nombre de fois où on la recharge, tout ça est déterminé par l’électrolyte », explique Ghislain Lescuyer, directeur général de Saft. L’électrolyte fait de Saft un leader technologique dans le domaine de la batterie et de la pile. Ce savoir-faire se fera uniquement à Poitiers. « La construction de cette usine va nous permettre d’augmenter la capacité de fabrication de l’électrolyte », confie Lenny Cypel, directeur du site de Poitiers. Actuellement, à Poitiers, sont produites chaque année 500 tonnes d’électrolyte. Dès 2021, l’usine devrait être mise en service dès janvier, ce chiffre va doubler afin d’atteindre les 1 000 tonnes. « Dans ce bâtiment-là on fabriquera et mélangera des produits chimiques dans certaines conditions de température et de pression, de manière à donner toute la qualité à notre produit », poursuit-il.  

Saft Poitiers et l’électrolyte, c’est une vieille histoire. « Un savoir-faire depuis plus de cinquante ans, précise Lenny Cypel. Cette technologie a été inventée à Poitiers dans les années 1970 et elle est industrialisée depuis les années 1990 ». Aujourd’hui, cinq docteurs-ingénieurs poitevins travaillent sur le sujet. « Ce sont les plus compétents dans le domaine », enchérit le directeur du site Saft. Finalement, ce bâtiment a été construit en terre poitevine pour une seule et bonne raison : conserver cette avantage technologique. « Pour s’assurer que ce secret de fabrication restait bien dans nos mains, on a décidé de localiser complètement à Poitiers, de le développer. Perspective de croissance », poursuit le DG de Saft, Ghislain Lescuyer. « L’avantage technologique vient de cette fabrication. On a tenu chez Saft à faire cet investissement en France car on n’a pas voulu s’exposer à d’éventuelles fuites technologiques ou fuites de savoirs », continue Lenny Cypel. Car Saft doit faire face à une féroce concurrence venant de Chine et des pays asiatiques très présents dans ce domaine.

Découpe de ruban devant le bâtiment de 1 900 m2 avec de g. à d. Lenny Cypel (directeur du site de Poitiers), Ghislain Lescuyer (dg de Saft), Alain Rousset (président de la Nouvelle-Aquitaine), Chantal Castelnot (préfère de la Vienne), Léonore Moncond'huy Découpe de ruban devant le nouveau bâtiment de production d’électrolyte avec de g. à d. Lenny Cypel (directeur du site de Poitiers), Ghislain Lescuyer (directeur général de Saft), Alain Rousset (président de la Nouvelle-Aquitaine), Chantal Castelnot (préfère de la Vienne), Léonore Moncond’huy (maire de Poitiers), Sacha Houlié (député de la Vienne) et Florence Jardin (présidente de Grand Poitiers)

Le premier employeur privé de Poitiers

Le fait de conserver cet avantage technologique permet de grossir et d’accompagner la croissance dans les métiers Internet des objets, mais aussi dans les activités traditionnelles comme le spatial, le militaire ou encore le médical. Des secteurs que l’on retrouve sur le site de Poitiers, du côté des ateliers de fabrication. Ici sortent chaque année 30 millions de piles. Le site tourne en 7/7, 24h sur 24. « Nous avons des machines qui tournent à plus de 100 coups à la minute, c’est-à-dire qu’elle fabrique plus d’une pile à la seconde. Nous continuons d’investir dans toutes nos technologies, ce qui nous permet de créer de l’emploi malgré tout. » Car Saft est le premier employeur privé de la ville de Poitiers. Aujourd’hui, le site compte plus de 660 collaborateurs et une centaine d’intérimaires. En 2019, 63 personnes ont été embauchées. Preuve d’une croissance de l’activité.  

D’ailleurs c’est à se demander où on trouve ces piles et batteries Saft. « Notre ADN est de les vendre à des industriels », répond le directeur du site de Poitiers ». Ces piles sont pourtant présentes dans notre quotidien : dans les systèmes de domotique, d’alerte, notamment pour les alarmes, mais aussi dans les compteurs dit connectés. « Désormais, les gens qui relèvent les compteurs passent dans la rue avec leur camion. Ils n’en descendent même pas. Quand ils passent, la pile réveille le compteur pour envoyer l’information. Le reste du temps, elle ne travaille pas et est en sommeil. Lorsqu’on a besoin de relever ces informations, elle doit se réveiller et ce qu’elles que soient les conditions parfois particulières, comme le gel et les fortes chaleurs, qu’elle a subies », précise Lenny Cypel.  


La Saft est le premier employeur privé de Poitiers avec 660 collaborateurs et une centaine d'intérimaires.

La Saft est le premier employeur privé de Poitiers avec 660 collaborateurs et une centaine d’intérimaires.

Très présent en Nouvelle-Aquitaine 

Saft est une entreprise très présente dans la région Nouvelle-Aquitaine. Un site à Bordeaux (Gironde), un autre à Nersac (Charente) puis à Poitiers. Elle a choisi de rapatrier en Europe une technologie maîtrisée par les asiatiques : le coeur des batteries, les cellules. « Beaucoup d’entreprises affirment fabriquer des batteries. Effectivement, elles font un assemblage, mais finalement le coeur de la batterie, les cellules, sont souvent importées de Chine ou de pays voisins », précise Ghislain Lescuyer. Et si l’entreprise, filiale du groupe Total depuis mai 2016, a choisi de rapatrier cette activité en Europe, il y a une raison. Un projet ambitieux. Un accord a été signé début septembre entre le groupe PSA-Opel et Saft pour la création d’une coentreprise : Automotive Cells Company (ACC). « On a l’objectif de fournir les batteries d’un million de véhicules d’ici 2030 ». Le laboratoire de R&D est situé à Bordeaux et la ligne pilote à Nersac (dans une usine inaugurée par le président de la République, Emmanuel Macron en personne, le 30 janvier 2020). « Une fois que nous aurons développé les prototypes d’ici le second semestre 2021, on pourra passer à une étape industrielle avec une usine ouverte dans le Nord de la France sur le site d’une ancienne usine de PSA à Douvrin (Pas-de-Calais, NDLR). Une dernière est de développer ensuite une usine en Allemagne à Kaiserslautern », ajoute le directeur général de Saft. Saft et PSA-Opel semblent complémentaires dans ce projet. « Saft maîtrise le process industriel de la batterie quand PSA-Opel maîtrise l’industrie de grande série. Nous sommes plus habitués à fabriquer des batteries pour l’espace. Ce sont des petites séries. C’est presque du fait main ». Découverte donc d’une production en grande série. L’enjeu va même plus loin que les batteries selon Ghislain Lescuyer. « C’est l’enjeu d’une maîtrise industrielle d’une profession, d’une activité qui est absolument clé dans la vie de tous les Français et de tous les Européens… ». Tout cela représente tout de même 5 milliards d’euros d’investissement, avec un soutien public franco-allemand d’1,3 milliard.

Aujourd’hui tous les fabricants de batterie travaillent à l’amélioration de l’électrolyte. Saft ne manque pas à l’appel. « On travaille sur l’évolution des batteries actuelles lithium-ion avec une certaine chimie NMC (Nickel, Manganèse, Cobalt). L’objectif est que ces batteries utilisent moins de matériaux rares. Les projets de recherche sur de l’électrolyte solide est l’une des voies des solutions probables pour améliorer la performance et le coût des batteries dans les années à venir », pense Ghislain Lescuyer. La batterie ne semble donc pas encore en fin de vie et risque de connaître du renouveau. 

En tout cas, à Poitiers, piles et batteries permettent à l’entreprise Saft d’avoir le vent en poupe. Un plan d’investissement de 20 millions d’euros est prévu entre 2018 et 2021. Un peu moins de la moitié est consacrée d’ailleurs au développement de l’électrolyte. Un savoir faire qui va s’exporter très largement sur d’autres sites de Saft à travers le monde, notamment en Chine et en Angleterre. Cela fait de Poitiers, la capitale de l’électrolyte. « C’est ce qu’on a voulu et ce qu’on va faire », conclut, tout sourire, Lenny Cypel.

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