L’Etat et les éditeurs à la rescousse des libraires : 9 millions d’euros d’aides annoncées


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L'Etat et les éditeurs à la rescousse des libraires : 9 millions d'euros d'aides annoncées

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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 03/06/2013 PAR Elodie Souslikoff

La crise s’accentue pour les libraires français : selon une étude Xerfi, leur situation s’est dégradée depuis 2011, date de la précédente étude. Le taux moyen de rentabilité net est ainsi de 0,6% contre 3,2% en moyenne pour le commerce de détail. La baisse de l’intérêt pour la lecture, l’avènement d’Internet et des géants de la vente en ligne comme Amazon (aux pratiques fiscales douteuses) mais aussi l’augmentation des charges des commerçants expliqueraient cette détérioration du marché. Pour mieux évaluer cette crise, une étude comparative entre cinq pays d’Europe et les Etats-Unis a été diffusée lors des Rencontres nationales de la librairie qui se sont déroulées dimanche et lundi à Bordeaux, au TnBA. L’enquête fait ainsi ressortir des problématiques et des constats similaires : la librairie, malgré la crise qu’elle traverse, reste le principal vecteur de vente de livres (40% des ventes de détail en France). La vente en ligne et la vente de livres numériques restent cependant marginales. En outre, ce qui relie les librairies de ces pays est leur stratégie de « buy local » (acheter local) qui vise à valoriser la fonction sociale des librairies, et les démarquer ainsi des librairies en ligne.

Un effort sans précédent des éditeurs et de l’Etat

Dans ce contexte tendu, la ministre de la culture Aurélie Filippetti avait annoncé un plan d’aide à la librairie en mars dernier au Salon du Livre, prévoyant la création d’un fonds d’avance à la trésorerie de cinq millions d’euros et le renforcement du dispositif d’aide à la transmission des fonds de librairie de quatre millions d’euros. Présente ce 3 juin à Bordeaux, la ministre de la culture a annoncé un nouveau coup de pouce aux librairies, puisque le budget librairie du CNL (centre national du livre), qui dispose de 2,5 millions d’euros pour 2014, sera complété de deux millions d’euros.

De son côté, Vincent Montagne, président du syndicat national de l’édition (SNE) s’est lui engagé à débloquer un fonds d’aide complémentaire de sept millions d’euros grâce à une contribution volontaire des éditeurs géré par l’Adelc (Association pour le développement de la librairie de création).

« Depuis quinze ans, je n’ai jamais vu un ministre et un syndicat annoncer un tel effort » s’est félicité Matthieu de Montchalin, président du syndicat de la librairie française (SLF).

La ministre a par ailleurs salué deux des propositions émises la veille par Alain Rousset, président du Conseil régional d’Aquitaine, notamment sur la création d’un établissement public foncier pour « sécuriser la présence des librairies indépendants en centre ville » et l’ouverture d’un débat sur la suppression du rabais à 9% pour les collectivités territoriales.

Elle a également annoncé réfléchir à une solution pour rétablir une concurrence plus juste entre les libraires indépendants et le géant de vente en ligne Amazon, qu’elle accuse par ailleurs de faire du dumping : « la gratuité des frais de port [que pratique Amazon et consorts] doit être limitée et ne doit pas être cumulée avec le rabais de 5% ». La loi Lang sur le prix unique du livre, qui oblige depuis 1981 les éditeurs à fixer un prix unique pour un ouvrage, permet en effet une remise par les libraires plafonnée à 5%.

Les libraires restent inquiets

Du côté des libraires présents sur place, ces annonces reçoivent un accueil mitigé. « On ne peut pas reprocher à des politiques de nous écouter. On est déjà revenu à la TVA à 5,5% [elle était à 7% depuis avril 2012 et devrait passer à 5% d’ici 2014] et on sent une vraie implication personnelle de la part de la ministre » reconnaît Françoise Bagyoni, propriétaire de la librairie Broglie à Strasbourg. Sébastien Doin, propriétaire de deux librairies en région parisienne, Nath a Lire et Cyclope, est lui plutôt sceptique : « pour l’instant, on en est juste au stade des promesses » lâche-t-il, précisant que le secteur se détériore de plus en plus rapidement ces dernières années. « Mon chiffre d’affaires a baissé de 8% en trois ans » confie-t-il avant d’ajouter que la priorité serait, selon lui, d’interdire la gratuité des frais de port à Amazon, et « arrêter cette autorisation de 5% de rabais » instaurée par la loi Lang.

Sur cette question, Françoise Bagyoni reste prudente : « Les 5% sont à manier avec des pincettes. Chez nous, on les pratique pour les personnes ayant une carte de fidélité. C’est à double tranchant » explique-t-elle, précisant que les librairies indépendantes ne peuvent pas pratiquer ce rabais sur l’ensemble de leurs livres, contrairement au géant Amazon. Si elle salue les annonces de la ministre et du président du Syndicat national de l’édition, Françoise Bagyoni confie toutefois que « être indépendant, ce n’est pas demander des subventions, c’est réussir à améliorer nos marges », ce qui pourrait selon elle passer par « une amélioration des remises pratiquées par les éditeurs » aux libraires. Elle avoue que la situation se complique également depuis deux ans dans sa librairie qui emploie 18 salariés. Les causes? Une augmentation des charges, mais aussi un problème de fond plus général : « Les personnes qui lisent beaucoup vieillissent. Et les 18-35 ans nous échappent » confie-t-elle, inquiète.

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