Trois grandes directions
Etape préalable à la définition de ce projet, la sortie de cet ouvrage collectif, signé de Martine Aubry, annonce la fin de cette période de réflexion et pose les bases d’un projet commun pour le PS. « Nous voulions à tout prix éviter le catalogue » plaisante Christian Paul, tout en expliquant que la création du laboratoire vient « d’une conviction profonde que la bataille des idées est essentielle ». Une bataille qui impliquait de « renouer des liens avec les innovateurs du quotidien, qui sont des spécialistes dans leur domaine, tous porteurs d’une vision de la société et qui offrent des regards croisés sur les questions de fond ». Une démarche longue et complexe qui se résume, selon Christian Paul, à répondre à une question simple « Quelle société voulons-nous ? ». En analysant les réponses données par les personnes interrogées on parvient à dégager « trois grandes directions », qui sont autant de chemins à suivre pour la politique du PS. Selon Christian Paul ces directions sont : l’instauration d’une « société du respect marquée par une égalité réelle», la nécessité de « remettre la création au centre des préoccupations » et « l’urgente réinvention d’une démocratie qui a été mise à mal par une hyperprésidence »,
Sur cette dernière direction, la philosophe Fabienne Brugère développe une analyse très critique selon laquelle la politique actuelle doit être remise en cause dans son ensemble jusqu’à la question des rapports entre gouvernants et gouvernés. Dénonçant les « dérives inégalitaires du modèle néo-libéral » et « le passage à une oligarchie basée sur l’idéologie de l’argent et du chiffre» elle estime que la politique doit redevenir un enjeu collectif et « se soucier davantage de l’intérêt public pour renouer au plus vite avec les idées ». Pour cela elle appelle à un changement de mentalité et à une réflexion sur les rapports sociaux qui doivent, selon elle, « échapper à la sphère marchande et être mis en valeur au détriment des actions entreprises individuellement ».
Le rôle des jeunes
De son côté, Juan Branco-Lopez (le plus jeune co-auteur du livre) insiste sur l’importance de permettre à la jeune génération d’agir. Une jeunesse vers laquelle le gouvernement « n’a pas d’initiatives valorisantes » selon lui. Une jeunesse qui pose également problème du fait de sa segmentation. En effet Juan Branco-Lopez déplore « le clivage que subit la jeunesse et l’absence de communication entre les deux pans d’une même génération, séparés par un fossé ». Lui-même étudiant, à Sciences Po, constate avec regret qu’il y a trop de différences entre « sa » jeunesse et celle qui est exclue de la société et ne bénéficiant pas des mêmes chances. Un écart qui augmente et qu’il faudrait pourtant combler grâce notamment à un projet de société commun. Un projet qui passe par « laperception, de la part des jeunes, des priorités qui leurs sont propreset qui échappent souvent aux décideurs plus âgés comme l’accès au logement, à la culture, à l’emploi ». Un diagnostic qui rejoint la première grande tendance relevée par Christian Paul ,selon laquelle la population appelle à plus d’égalité et ce dès le début, c’est-à-dire dès l’entrée à l’école.
Selon les domaines d’activités et la situation personnelle de chacun on voit donc que les visions ne sont pas les mêmes et les angles de réflexion non plus. Mais si les constats de chacun des auteurs concernent des réalités différentes, tous ont le même but, contribuer à la création d’un programme qui couvre l’ensemble des enjeux auxquels la politique va devoir répondre et qui puisse concerner tout le monde. C’est le pari audacieux que relève cet ouvrage dont le titre « Pour changer de civilisation » traduit cette volonté d’agir pour l’avenir.
Photos : Richard Ying
Espace Albert Mollat, 15 rue Vital-Carles à Bordeaux
Plus d’informations sur le site du laboratoire des idées du Parti Socialiste : http://www.parti-socialiste.fr/laboratoire-des-idees
Aymeric Bourlot