Aqui! : Après près d’un an d’aller-retour entre l’Assemblée nationale et le Sénat, avec à la clé plusieurs amendements, la réforme des collectivités territoriales vient d’être adoptée, que pensez-vous de cette mouture définitive ?
Alain Rousset : Je pense qu’elle est révélatrice de la difficulté qu’ont l’Etat et le gouvernement à réformer. Cette réforme a été adoptée, alors que la quasi unanimité des collectivités territoriales de gauche comme de droite y sont hostiles. Il y a eu une absence d’écoute totale. Les associations des Départements et des Régions n’ont pas été entendues.
@! : Que vous inspire l’arrivée du conseiller territorial, un nouveau statut créé par la réforme ?
AR : C’est une absurdité démocratique et institutionnelle. La rapprochement des départements et des régions est une erreur stratégique. Les départements travaillent au niveau des communes, des intercommunalités, alors que les Régions ont, elles, des compétences dans le domaine de l’économie, de la recherche, qui sont proches de celles de l’Etat ou de l’Europe. Ce sont deux institutions qui n’ont pas la même culture. Il y a là un problème de casting, qui ne peut s’expliquer que par une exacerbation de la culture jacobine au plus haut sommet de l’Etat.
@! : Quelles conséquences concrètes va avoir cette réforme ?
AR : Il n’y aura pas de répartitions claires des compétences entre Départements et Régions. le problème surtout est que l’on va mettre une logique cantonale sur des compétences régionales. Or, les conseillers régionaux ont des problématiques qui dépassent le territoire d’un canton. Par ailleurs, cela va se traduire par des conseils généraux sous la tutelle des Régions et un recul de la parité du fait de la représentativité aux cantonales. Tout ceci aura pour conséquence de politiser à l’extrême la gestion locale. C’est affligeant. Comment va-t-on faire dans des régions comme la Basse Normandie, où le Conseil régional est à gauche et le Conseil général à droite ?
Interview : Nicolas César