Poitiers : la « Nuit des idées » éclectique et génératrice de rencontres


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Poitiers : la « Nuit des idées » éclectique et génératrice de rencontres

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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 02/02/2019 PAR Julien PRIVAT

Le Théâtre Auditorium de Poitiers (TAP) accueillait, ce jeudi 31 janvier, la 2e édition de la Nuit des Idées. A 18 heures, les premiers participants arrivent pour un « World cafés ». Cet atelier-débat est animé par Florent Audat et Juliette Laguens du SPN (réSeau Professionnel Numérique). Une vingtaine de personnes y participent et échangent autour de trois thématiques : les mutations environnementales, les mutations socio-politiques et les mutations technologiques. A chaque table un scribe joue le rôle de rapporteur ; chaque groupe change tous les quarts d’heure de thématiques afin d’aborder tous les jeux. « Le principe est de créer des discussions entre des gens d’horizons différents, explique Juliette Laguens. Les échanges sont intéressants et constructifs. Après nous faisons un point et nous mélangeons les idées. »

Un colonel, un ancien ministre brésilien, autour de la table

Après cette mise en bouche vient la première table ronde sur le thème « faire face à l’inattendu ». Les participants : Le colonel, Michel de Mesmay, du 9e BIMA (Brigade d’Infanterie de Marine de Poitiers), Cristovam Ricardo Cavalcanti Buarque (ancien ministre de l’Éducation nationale du Brésil, ingénieur, économiste, enseignant, professeur, doyen de l’université de Brasilia) et, par vidéo-conférence de Paris, Mathilde Larrere (historienne et enseignante-chercheuse). « Quand il arrive quelque chose de nouveau, il faut faire face et agir. Le militaire a une pensée inachevée, car il doit arrêter de penser et agir sinon l’ennemi en face le fera », analyse le colonel. Il a partagé ses propres expériences du terrain de conflit, notamment en Irak. « Tous les deux ou trois jours, il y a une surprise stratégique, on est obligé de réfléchir et changer l’équation ». Les soldats se préparent donc à ce moment inattendu. Mathilde Larrere a déconstruit aussi cette notion en citant Alexis de Tocqueville qui avait prévu dès 1847 la crise de 1848. « L’inattendu ne l’est pas finalement pour tout le monde, il faut regarder au bon endroit », explique l’historienne. Elle va même plus loin affirmant que cette notion est construite parfois pour justifier les échecs.  

Autre temps fort de cette Nuit des idées : La Génération What ? Il s’agit d’une enquête en ligne lancée sur les jeunesses européennes débutée en 2013 qui court jusqu’en 2020. Christophe Nick en a profité pour réaliser un documentaire basé sur des interviews réalisées en France et dans quelques pays européens, afin de comparer leur vision de la jeunesse. Une véritable enquête sociologique sur un échantillon important de plus de 2 500 personnes. « L’objectif est de réaliser un portrait de cette génération. Une jeunesse en rupture », explique le journaliste. Au total, il y a eu 250 000 participants à ce questionnaire d’une centaine de questions. « Il a fallu traiter plus de 25 millions de réponses ». Il en ressort plusieurs résultats, comme le manque de confiance en la société, en ses institutions, dans les médias. « Les jeunes ont un regard assez noir sur la société ». Des résultats divergent selon les pays européens. Christophe Nick est en train de réaliser le même exercice sur les pays arabes de la façade méditerranéenne et au Japon. Il dispose de 19 diffuseurs dans une quinzaine de pays. Preuve que la jeunesse intéresse mais inquiète également. « Quelque chose de lourd va se produire. J’en suis convaincu. Il y a déjà des alertes comme Greta, cette Suédoise de 15 ans, qui est devenue une icône planétaire, pour son discours à la COP 24 qui demandait aux dirigeants de prendre conscience qu’il fallait bouger pour la planète. On parle également en Europe de grève des cours les vendredis dans les lycées. Une grève du bac est évoquée. Quelque chose de prévisible est en train d’arriver dans la génération la plus éduquée de tous les temps, qui est à la recherche de leur racine profonde ». 

Le projet du quartier du palais

En filigrane, tout au long de la soirée, le quartier du Palais de Poitiers. « L’année dernière, la Nuit des idées avait été le point de lancement de la concertation » rappelle Hélène Amblès, directrice générale de la Culture, du Patrimoine de la ville de Poitiers. Cette fois-ci, c’est la restitution de plus de 3 000 Poitevins interrogés qui fut abordée. Il y a également eu la signature du protocole de partenariat patrimonial et archéologique entre l’État et la ville de Poitiers dans le cadre du projet du quartier du palais entre Alain Claeys (maire de Poitiers), Arnaud Littardi (directeur régional des affaires culturelles Nouvelle-Aquitaine) et Emile Soumbo (secrétaire général de la préfecture de la Vienne). 

Enfin, dernière table ronde, « Agir pour quitter la peur : les nouvelles formes d’engagement ». L’occasion de découvrir l’association poitevine Buddy System. Créée en septembre 2017, elle permet aux étudiants étrangers d’avoir un parrain qui lui fasse découvrir la culture française. « On a des personnes face à nous. Elles veulent réussir à s’intégrer. On leur apporte ce dont elles ont besoin », explique Léa, étudiante bénévole de l’association. Autre témoignage, celui de Nils Skaghammar, en service civique l’an dernier, au sein d’Unis-cité. Il a participé au programme « rêve et réalise » pour développer un projet solidaire. Il a voulu agir en faveur des sans-abris. « Nous voulions les aider à sortir de l’isolement, qu’ils rencontrent d’autres personnes qui ne sont pas des sans-abris ou des assistantes sociales. » À son grand regret, à la fin de son service civique, l’association qu’il a montée est en sommeil actuellement et aimerait que son idée soit reprise. L’équipe du film Asma, projeté durant cette Nuit des idées, était également présente autour de la table. Celui-ci retrace l’exil de sept jeunes du Soudan jusqu’à Châtellerault. « Ils ont voulu très vite apprendre le français. Pour cela, il faut le pratiquer, le parler avec des familles, explique Dominique Casari. Elles ont accueilli, parrainé des réfugiés. Au départ, les gens ont eu peur, mais finalement ça s’est bien passé. Des amitiés se sont créées et au moment de leur départ ça a été difficile. » Un échange de culture s’est produit via cet accueil. Tout autre sujet sur cette thématique : la nourriture à base d’insectes. NextAlim, entreprise créée en 2014, y a pensé. « L’insecte peut contribuer à la sécurité alimentaire humaine et animale » explique son pdg, Jean-Bernard Escoufier. D’autant plus que les insectes sont plutôt écologiques. Ils se nourrissent de déchets, d’invendus, de résidus alimentaires. On leur prépare une sorte de soupe, explique la responsable recherche et développement Anne-Sophie Roche-Bruyn. Il faut seulement 4 kg d’aliments pour produire 1kg d’insectes, alors qu’il en faut 8 pour 1 kg de viande. Ce qui fait réfléchir sur de nouvelles formes qui émergent et qui vont sans doute forger notre société et écrire notre présent. 

Les étudiants de Sciences Po Poitiers ont également organisé des intermèdes artistiques : pièces de théâtre, lecture, danse sur des sujets actuels tels que la migration, l’excès d’apathie et de narcissisme. A minuit, la Nuit des idées touchait à sa fin, les gens ont pu découvrir de nombreuses idées et initiatives, avant de se donner rendez-vous l’année prochaine pour une troisième édition poitevine qui regorgera sans doute de beaux et nouveaux projets. 


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