Exercice de rôdage et, surtout, de verdissement ce mardi 14 janvier pour Nicolas Florian. Le maire de Bordeaux et candidat aux prochaines municipales a profité de l’ambiance feutrée du théâtre Fémina (avec une salle quasiment pleine) pour dévoiler les premières propositions d’un futur programme qui sera distribué aux Bordelais avant la fin du mois de janvier. L’essentiel de la soirée était cependant attribué aux quelques 1 000 contributions affichées et récoltées auprès des différents soutiens. Julia Mouzon, l’une des têtes pensantes de la campagne du maire-candidat, en a profité pour animer une série de 14 pitchs d’environ trois minutes présentés par des « contributrices et contributeurs » chargé(e)s de faire la synthèse des idées proposées dans les ateliers qui se sont tenus ces derniers mois, depuis son arrivée en septembre. Déclinées en différentes thématiques (santé, sécurité, mobilité, inclusion), elles faisaient écho aux quatre engagements pris par Nicolas Florian, égrennés dans une lettre distribuée à tous les habitants de la ville en fin d’année. « Nous ne voulons pas d’une ville décidée de loin par des idéologues », a-t-on ainsi pu entendre en introduction d’un show visiblement assez millimétré qui a aussi laissé, au travers de petites séquences vidéo, la parole aux Bordelais(es). « Répondre aux défis climatique, démographique, démocratique et social, nous le ferons », a ainsi scandé Julia Mouzon à une salle peu avare en applaudissements de circonstance.
Virage vert
Mais le fait notable, marquant de cette soirée, c’était bien entendu le discours du principal interessé, dont l’insistance pour l’écologie et le social ne laisse aucun doute sur son intention de chasser sur les terres de son adversaire écologiste, Pierre Hurmic, et son alliance à gauche. Au travers de nombreuses propositions, Nicolas Florian a ainsi dressé le portrait d’un mandat « de fondation, d’enracinement, de sobriété (un mot fétiche) et d’innovation ». Les lumières de la salle ne se sont pas teintées de vert, mais le discours, en revanche, a entamé un virage clair. Ambition d’une ville zéro déchets en 2026, « grand centre de tri et de recyclage des matériaux de construction » à La Jallère (oublié le programme immobilier), ambition d’arriver à 100 000 habitants autosuffisants en énergie renouvelable, jardin potager sur le toit de la base sous marine…
Du côté de la mobilité, une volonté certaine de créer davantage de voies dédiées et d’accès sécurisés aux vélos s’est faite ressentir (avec un plan de stationnement dédié aux vélos et aux deux roues motorisées sur l’espace public). Egalement, initier une partie de la flotte de transports à l’hydrogène dans la prochaine délégation de service public (et plus de 50% de celle des bennes à ordures) ou encore – l’une des seules propositions de la soirée disposant d’un budget concret – de consacrer 30 millions d’euros à la mise en place de neuf nouveaux pontons sur la Garonne pour y développer le réseau de transports fluviaux, batcub en tête, au sein d’un fleuve qui serait considéré comme « le neuvième quartier de Bordeaux » et doté d’un nouveau pont entre Bassens et Bordeaux Nord, au sein duquel les lignes B et C du tram seraient reliées, notamment pour « mieux desservir le stade Matmut ».
Symboles et social
Les propositions n’ont pas non plus manqué de symboles. Nicolas Florian a ainsi affiché son intention de renommer plusieurs rues de la ville au nom de cépages et de différents territoires viticoles du vignoble bordelais, histoire d’en être « le premier ambassadeur ». Tout au long d’un discours fourni reprenant à son compte une partie des propositions lancées par les contributeurs/trices, le maire de Bordeaux s’est aussi prêté à un petit « festival des maisons » : maison des aidants, maison des entrepreneurs, maisons de l’artisanat et des métiers, maisons des femmes victimes de violences, cité de l’alimentation au Marché d’Intérêt National Bordeaux-Brienne… les totems ne manquaient pas. Côté économie, on a pu noter un tropisme net vers les artisans et commerçants de la ville, dont certains sortent tout juste d’un « plan d’urgence » : regroupements d’artisans pour répondre prioritairement aux appels d’offres et à une partie des marchés publics de la ville, plateforme dédiée au commerce numérique bordelais, consultation pour l’organisation de livraisons à domicile en mobilité douce, achat en « drive » dans des lieux dédiés, le tout à grand renfort de « voilà l’une des propositions que nous ferons pour la ville » qui a reçu les applauddisements de la salle.
Enfin, le dernier plaidoyer notable de ce premier discours public fut social : accélération de la construction de logements sociaux (pour tenir l’objectif des 25%) et de celle des logements « abordables » (maximum 3 000 euros du mètre carré), obligation d’un permis de louer pour les bailleurs et propriétaires dans l’ancien pour lutter contre l’habitat indigne, séance annuelle du conseil municipal dédiée aux questions et pétitions citoyennes, conseil de développement et d’évaluation de la politique municipale composé de citoyens tirés au sort ou volontaires, création d’un conservatoire des arts vivants dans chaque quartier, Plan Local d’Urbanisme revu et « révisé dans sa totalité » pour être « rendu plus lisible »… L’implication des habitants a donc servi de clôture au discours, d’aucun pourrait y voir un effet « gilets jaunes »…
Au moment du bilan, à la sortie de la salle, les opinions sont plutôt favorables au candidat. Au rayon des critiques face à des spectateurs interrogés en fin de meeting, on a pu noter un virage vert clairement remarqué, un manque d’insistance sur la sécurité (des patrouilles et un hôtel de police mixte partagé avec la police nationale ont été annoncés) et une absence remarquée : celle de la fiscalité, sur laquelle Nicolas Florian s’est déjà en partie exprimé lors du conseil municipal de novembre en promettant qu’il n’y aurait pas d’augmentation d’impôts durant le prochain mandat et du budget nécessaire à toutes ces annonces y compris celle, un peu plus remarquée que les autres, de la création d’une piscine sur les quais de Bordeaux. Le document de campagne promis pour fin janvier sera peut-être une occasion de préciser les « choses » de ce côté. « Nous ne devons pas minimiser ce que nous sommes et ce que nous représentons. Bordeaux dispose d’un potentiel humain qui ne demande qu’à être mobilisé », a ainsi terminé Nicolas Florian au moment d’annoncer une liste complète composée, comme il l’a précédemment annoncé, d’un renouvellement pour moitié pour le 15 février. Ce qui laisse un boulevard pour les réponses, qu’elles soient écologistes ou non.