Mont-de-Marsan – Dax. Dans les Landes, c’est le derby par excellence et pas qu’en rugby. Quand l’une dit blanc, l’autre dit noir, par conviction, ou par réflexe, on ne sait plus trop. A la fois si proche et si lointaine, c’est en tout cas, ce qu’elles aiment à (faire) croire. Mais les deux villes mènent bien parfois des destins parallèles, à l’image des élections municipales de 2008 qui les ont toutes deux vues basculer politiquement (mais, évidemment, pas du même côté…).
Le 16 mars 2008, Mont-de-Marsan, historiquement socialiste en la figure de Philippe Labeyrie, se laisse séduire par une nouvelle venue en politique, la Modem Geneviève Darrieussecq, désormais membre du Gouvernement. Le même soir, à Dax, c’est Gabriel Bellocq, le socialiste , qui prend la main sur cité thermale, jusque-là bastion serré de la droite, avec un peu plus de 56% des voix face l’UMP Jacques Forté. Une soirée, deux chocs.
Deux maires héritiers
Deux victoires confirmées en 2014, haut la main et dés le premier tour pour Geneviève Darrieussecq à Mont-de-Marsan, et un peu plus difficilement pour Gabriel Bellocq, empêtré au second tour dans une triangulaire face à la droite et au Front national. Au total pourtant, l’équilibre PS – centre droit est maintenu entre les presque deux capitales landaises. Mais en 2016, Gabriel Bellocq décide pour des raisons personnelles de céder son écharpe à son adjointe Elisabeth Bonjean, quand en 2017, comme par un impérieux besoin d’alignement des planètes landaises, Geneviève Darrieussecq, élue députée, répond à l’appel présidentiel de rejoindre le Gouvernement, laissant à son tour son siège de maire à Charles Dayot.
Deux maires héritiers en quelque sorte, qui n’oublient pas, le plus souvent, de citer dans leurs discours leurs généreux prédécesseurs… Deux maires qui se lancent chacun dans la bataille de 2020, avec cette fois, leur nom en gros sur l’affiche. Mais contrairement aux batailles précédentes, pas d’étiquette, même si les tendances restent et les bilans entièrement endossés, face à des opposants qui veulent, évidemment de nouveau jouer la carte de l’alternance… ou carrément renverser la table pour la liste citoyenne en lice à Mont-de-Marsan.
Duel dans la ville thermale
A Dax, Elisabeth Bonjean a levé le voile sur « le secret de Polichinelle » de sa candidature début janvier. Une candidature sans étiquette donc, mais « tout le monde sait très bien que je suis une femme de gauche » concède volontiers celle qui a rendu sa carte au parti socialiste. Si la présentation de sa liste et le lancement de sa campagne « Dax en Commun » est officiellement programmée pour ce jeudi 23 janvier, la Maire de Dax précise déjà s’appuyer sur une liste renouvelée de moitié. En effet, 50 % de ses co-lisitiers sont issus de la majorité sortante, dont ses adjoints Stéphane Mauclair et Isabelle Rabeaud- Favereau, et 50% seront de nouveaux venus. Objectif : « une équipe renouvelée et rassemblée autour des valeurs de solidarité, de bienveillance, d’humanisme et très tournée aussi vers l’innovation et le développement économique » a-t-elle confié au micro de France Bleu Gascogne. Si la maire sortante compte bien s’appuyer sur son bilan et « les engagements tenus » de la mandature qui s’achève, elle appuiera aussi son programme sur les thématiques de l’écologie urbaine, la démocratie participative, ou encore la proximité. Pour les détails, il faudra encore un peu attendre.
Face à elle, un seul candidat, déclaré depuis le mois de décembre, Julien Dubois ; et dont la liste « L’énergie du renouveau » se pose aussi sans étiquette. Lui-même ex Les Républicains, lui aussi « héritier » d’un certain Jean-Pierre Bastiat, il faut lire dans l’équilibre général de sa liste, le résultat d’un rassemblement tendance droite et centre droit, dans laquelle apparaît déjà un nom, celui de Martine Dedieu, suppléante du député Lionel Causse et investie dans ces municipales par LREM. Si Julien Dubois affirmait jusque-là que « tout le monde peut participer à l’avenir de la ville » et que « tous sont les bienvenus », la composition finale de la liste, qui compte aussi, annonce-t-on, des personnalités proches du Modem ou de l’UDI, sera présentée ce mercredi 22 janvier, la veille donc de la présentation de la liste adversaire.
Si le bilan de l’équipe municipale sortante sera volontiers sujet à critique, le programme de campagne de Julien Dubois et de ses colistiers, s’inspire aussi dit-il des rencontres citoyennes organisées depuis plus d’un an par l’association Agora Dax qu’il a lui-même lancée. Pour l’heure, il annonce comme priorité « le réaménagement et la refondation de notre centre-ville, afin qu’il redevienne le cœur de l’attractivité de notre ville ». Autres axes évoqués : la « fin du matraquage fiscal local », la sécurité et la qualité de vie.
En tout état de cause, si les élections se jouent en duel, alors outre une situation inédite à Dax depuis près de 40 ans, la victoire de la permanence ou de l’alternance, se jouera en un seul tour. Mais, le dépôt des candidatures en Préfecture devant être fait entre le 10 et le 27 février, il est encore temps pour que d’autres candidats entrent dans la course même si, pour l’heure, rien n’indique une telle éventualité pour les observateurs locaux. Pas plus dans les rangs politiques, et notamment aux extrêmes, qu’au sein de la société civile qui se saisit souvent des municipales pour constituer une liste citoyenne, comme c’est le cas à Mont-de-Marsan.
Trois listes dans la ville aux trois rivières
Dans la capitale landaise justement, le maire sortant, Charles Dayot, remplaçant désigné de et par Geneviève Darrieussecq, n’a pas fait longtemps suspense de sa volonté de garder pour lui le fauteuil de maire : l’annonce de sa candidature date déjà du mois de juin ! De quoi frôler avec la polémique et friser la rupture avec la Secrétaire d’Etat aux Armées qui n’avait semble-t-il pas tout à fait renoncer à l’idée de retrouver son écharpe tricolore… Quoiqu’il en soit désormais, c’est à tout le moins en soutien au candidat-maire qu’elle apparaît, notamment lors de l’inauguration de son local de campagne début janvier, et peut-être bientôt en colistière. Le voile de la composition de la liste portée par Charles Dayot, « 100% pour les montois », sera levé le 1er février prochain. Mais quelques indices déjà sur ce listing « sans étiquette » : il reprendra 60 à 70% de l’équipe majoritaire en place à la mairie de Mont-de-Marsan, annonce le candidat réussissant ainsi à prolonger l’alliance droite et centre droit qu’avait su créer sa prédécesseure. « S’il y a bien quelques petites nuances entre nous, nous avons un bilan en commun et une vision partagée pour le territoire », explique-t-il. « Ce que nous avions annoncé, nous l’avons réalisé ».
Au delà de la « fierté » du bilan, en fut il à demi responsable, Charles Dayot a énoncé quelques « piliers forts » de sa campagne, lors de l’inauguration de son local de campagne : « l’espace naturel, la préservation écologique de notre environnement, le travail que l’on doit faire encore et encore pour booster l’attractivité du territoire et autour l’épanouissement et le bien vivre ensemble toute génération confondue ». Face lui, 2 listes pour l’heure, sont en course.
D’abord, « Le nouvel élan populaire » qui affiche (une fois n’est pas coutume) ses étiquettes. Menée par Jean-Baptiste Savary, le secrétaire de la section socialiste du Marsan, la liste réussit à rassembler les partis PS, PC, le Parti de gauche, EELV et Génération écologie 40 auxquels se sont joints, depuis le lancement des travaux et négociations autour de cette liste et de son projet, « beaucoup de membres de la société civile qui ont des valeurs de gauche » ajoutait la tête de liste lors de sa déclaration de candidature en décembre. « Pour une fois, la gauche partira rassemblée ! », souligne-t-il. Une liste pas encore totalement dévoilée, mais dans laquelle apparaissent des figures montoises déjà bien connues comme Alain Baché pour le PC, ou Céline Piot pour le parti de gauche, mais aussi assure le jeune candidat (32 ans) de nouveaux visages (outre le sien) notamment chez les Verts.
Côté programme et conviction, amer sur le bilan « Dayossecq », selon l’expression de son soutien, le député Boris Vallaud, et inquiet du recul important de la population dans la ville, Jean-Baptiste Savary promet un projet « en rupture » avec les pratiques et politiques en cours. Parmi ses grands axes de bataille, il cite le développement du cœur de ville, la politique environnementale, « qui doit être traitée en priorité », les mobilités douces, la santé publique, avec un projet de pôle pluridisciplinaire de santé, la démocratie locale avec la proposition d’un budget participatif, ou encore la culture et l’éducation.
La rupture, c’est aussi un des points, si ce n’est le cœur de la motivation de la troisième liste montoise déclarée pour ces municipales 2020 : « Marsan citoyen ». Mais plus qu’une rupture sur les politiques, la liste citoyenne revendiquée « indépendante des partis » prône avant tout « une véritable démocratie locale, sociale et écologique ». Et avant même de parler de liste, ou de programme, l’idée de ce collectif d’habitants de Mont-de-Marsan, est d’inviter les montois à « parler des problèmes qui se posent à eux dans le quotidien : déplacements, éducation, santé, information, etc. et à établir un plan d’action », comme les y invite la page Facebook du collectif. Et ce notamment à l’occasion de « mercredis citoyens » organisés dans les quartiers de la ville pour associer les montois à la construction du programme.
Un programme qui a déjà tout de même quelques trames posées : un nouveau statut d’élu (bénévole), des assemblées citoyennes, ou encore l’instauration du référendum local pour le vote des grands projets et dépenses que souhaiterait engager l’équipe municipale… Pour l’heure, pas de tête de liste désignée, mais si le collectif compte en son sein de nombreux anonymes, y figurent aussi quelques noms connus des montois dont Marie Laffite, ex PS, Laurent Péguy, les Insoumis, Pierre Bertranne (Attac).