« Les pays qui n’ont pas de légendes seront condamnés à mourir de froid » aime à dire François Bayrou, en citant « un poète oublié ». Or, quoi de plus légendaire que le Tour de France, et quoi de plus solides que les liens qu’il a noués avec Pau. Une ville qui, explique son maire, aime ce type de récits. Surtout quand ils sont « faits de chair et de sang ».
Sur un ancien vélodromeDepuis les années trente, cette histoire d’amour tissée entre la cité béarnaise et l’une des épreuves sportives figurant parmi les plus célèbres au monde a pris corps à travers 67 rencontres. Elles ont parfois été brèves et n’ont pris que le temps d’un départ d’étape ou d’une arrivée. Elles ont aussi été plus longues, l’espace de deux nuits et de trois journées, comme c’est le cas cette année.
Cette idylle sportive a désormais son illustration. 103 stèles jaunes, ou totems, dédiées aux vainqueurs de la grande boucle et baptisées « Le Tour des géants » ont été installées sur l’herbe du parc Henri Tissié. A l’emplacement d’un ancien vélodrome qui se trouvait à deux pas de la gare SNCF.
« C’est aussi le mémorial des anonymes » Accompagnées de photos, et accessibles également sur smartphone grâce à la technologie du QR code, les histoires qu’elles racontent sont nées sous la plume de l’écrivain palois Christian Laborde. Un fana de vélo dont le verbe est aussi vivant, fougueux et coloré que les chansons de Nougaro, pour lesquelles il nourrit une passion vibrante.
Chaque année, une nouvelle stèle les rejoindra et un nouveau champion sera invité en Béarn pour la dévoiler. « Ce mémorial n’est pas le monument des triomphes » explique cependant le maire. « C’est aussi et surtout le mémorial des anonymes, des sans-grades, des équipiers sans lesquels il n’y aurait pas de champions ».
« Merci d’honorer les anciens »Lors de l’inauguration, le geste a été apprécié par le béarnais Gilbert Duclos-Lassalle qui s’était jadis « sacrifié » sur ses terres pour permettre à Greg Lemond de remporter son 3e Tour de France.
« Merci d’honorer les anciens » a pour sa part commenté Bernard Hinault, entouré d’une kyrielle de champions parmi lesquels on reconnaissait Bernard Thévenet, Greg Lemond, Stephen Roche, Richard Virenque, Dominique Arnaud.
Sans oublier des coureurs locaux ayant, eux aussi, participé à l’histoire de la Grande Boucle : Robert Cazala, originaire de Bellocq, ou encore Marcel Queheille, qui a remporté en 1959 l’étape disputée entre Bordeaux et Bayonne . Tout un plateau de sportifs que les épouses de Raymond Mastrotto, « le taureau de Nay », et de Luis Ocana ont également été invitées à rejoindre sur scène.
Une même reconnaissance a été exprimée par les organisateurs de l’épreuve, dont Christian Prudhomme, le directeur du Tour de France, ravi de voir ce « musée vivant » être aménagé à ciel ouvert. « Cela va ancrer encore les liens indéfectibles de Pau avec la Grande Boucle ».
Pau, « capitale du Tour », alors ? Lundi, François Bayrou a nuancé le propos en expliquant que sa ville partageait le titre avec « l’autre capitale » qu’est Paris.
« Un investissement modeste » Chassez le naturel politique, il revient toujours au galop. Le coût du mémorial reste modeste (200 000 €) a également indiqué l’édile Modem, qui a été élu en faisant campagne sur le besoin de notoriété de sa ville et sur la nécessité de « faire mieux en dépensant moins ». Ce qui représente 1 à 2% du prix d’un grand équipement, comme le stade nautique, lancé par l’équipe municipale précédente.
Par ailleurs, le hasard fait bien les choses. Les stèles qui le composent ont constitué la première commande importante reçue récemment par une entreprise du grand sud-ouest. Il s’agit de Gillet Industries à Albi, la plus ancienne fonderie de France, reprise en société coopérative de production par ses salariés après avoir fait face à de sérieuses difficultés financières.
Le mémorial fera partie d’un circuit touristique dans lequel le maire souhaite intégrer le château natal du roi Henri IV. Un édifice qui sera mis en valeur par un son et lumière chaque soir, à partir du 1er aout.
Le Tour de France, puis le Vert galant… Un voyage d’une légende à l’autre.