La jeunesse des partis politiques en débat à Sciences Po


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La jeunesse des partis politiques en débat à Sciences Po

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Temps de lecture 6 min

Publication PUBLIÉ LE 05/03/2015 PAR Romain Béteille

Pour un peu, on se serait cru dans un débat politique officiel. L’UMP, les Jeunesses Socialistes, l’UDI, le FN, EELV, les Jeunes Communistes ou encore l’UDI, tous les partis étaient représentés mercredi soir lors d’une soirée de débats, la première du genre à Bordeaux, organisés au sein de l’Amphithéâtre Montesquieu, en plein coeur des locaux rénovés de Sciences Po, sur le campus de Pessac. A la seule différence près que la parole des partis était cette fois représentée non pas par des élus ou des candidats, mais par… des étudiants ! Ils sont intervenus sur des questions aussi épineuses que le retour du fameux slogan de Nicolas Sarkozy en 2007 : « Travailler plus pour gagner plus », « Le nucléaire, une énergie d’avenir » ou encore « Immigration : une chance pour la France » ? L’ensemble des faux élus mais vrais engagés au sein de leurs partis respectifs (ils sont tous intervenus en accord avec l’association étudiante qui représentait leur parti, sur la base du volontariat) devait non seulement donner un point de vue sur chaque axe mais aussi faire une série de propositions (pas toujours très claires, d’ailleurs… comme dans les vrais débats politiques) à mettre en place. Le tout avec une contrainte, sans doute la plus difficiles pour ces futurs hommes et femmes politiques : ne pas dépasser les 17 minutes allouées à chaque débat. Morceaux choisis.

« Travailler plus pour gagner plus : le retour ? »Parfois drôles, respectant la plupart du temps la philosophie et l’identité de chaque parti, les échanges se sont enflammés et ont vite tourné aux petites phrases et aux accusations détournées, ce qui déclenchait souvent les rires ou les huées d’une salle pleine d’étudiants venus participer à cette soirée un peu unique en son genre. On retiendra quelques phrases bien tournées, notamment celles de Paul Melun, représentant des jeunes socialistes au cours du débat sur le travail : « Ce slogan revêt un aspect sociétal. Il propose un appât du gain, une frénésie du travail, alors même que la volonté du parti socialiste, c’est au contraire de limiter le travail pour donner plus de libertés. Face à un contexte de chômage de masse, Nicolas Sarkozy proposait de faire travailler davantage ceux qui étaient déjà en situation d’emploi. L’UMP conteste les 35 heures, alors même qu’elles sont responsables de la création de plus de 350 000 emplois depuis leur mise en place ».

Alexandre Fongaro, représentant des Jeunesses UMP, n’est pas en reste pour répondre à la gauche : « Le coût des 35 heures est considérable, et le recrutement coûteux. Lors de sa mise en place, 76% des français étaient favorables à l’application de ce slogan. Le fait que Sarkozy ne soit pas revenu sur les 35 heures est sans doute le reflet d’un manque d’appui politique ». Au milieu du traditionnel clivage gauche droite, Nicolas Pereira, représentant du parti Nouvelle Donne (officiellement entré en campagne cette semaine), préfère repenser le rapport au travail : « 89% des français disent être malheureux au travail. Il y a environ 10 millions de personnes en situation précaire en France. Nous préférons faire des propositions concrètes sur le partage du temps de travail, comme l’arrivée d’une semaine de 4 jours, qui a déjà fait ses preuves dans certaines grandes entreprises comme Mamie Nova. La politique de 30,5 heures a déjà été testée et approuvée en Allemagne. Le modèle pourrait très bien être adapté chez nous ». On vous passe les huées et les levées de boucliers… 

L’immigration : une chance pour la France ? Sans doute l’un des « affrontements » les plus attendus, avec à la table 3 représentants  : Paul Azibert pour l’UMP, Emilia Noah pour le PS et Jordan Sztang pour le FN. Evoqué pêle-mèle par ce dernier, une « identité nationale déconstruite », le « désastre de Mare Nostrum » et le problème du coût de l’immigration, estimé à 42 milliards d’euros, « largement sous évalué. On peut compter aussi dedans le coût de la police, par exemple », se fend l’étudiant, faisait indirectement un petit raccourci entre « l’immigration et la délinquance ». La représentante socialiste était là pour veiller au grain : « Certes, le coût de l’immigration en 2006 était estimé à 49,9 milliards d’euros par an. Mais vous oubliez les recettes qu’elle engendre : 60,3 millards d’euros, soit un bilan positif de 12,4 milliards d’euros. Il faut cesser les amalgames sur les immigrés. La France n’est pas un pays d’immigration massive mais d’immigration diffuse. Il y a en France environ 200 000 nouveaux immigrés par an, soit 0,3% de la population. Le solde migratoire est inférieur au solde naturel. Dans un récent sondage, 64% des immigrés déclarent se sentir français ».

L’UMP botte en touche, défendant une « immigration responsable, qui prenne en compte l’UE et la mondialisation. Cette immigration passe par une maîtrise essentielle des flux migratoires, et pour ça il faut savoir quelle immigration légale on veut. L’intégration n’est rien sans cette notion de flux ». « L’immigration choisie est un concept fourre-tout », répond le PS, « on ne peut pas choisir entre la misère et la misère. L’UMP ne tape sur les immigrés que lorsque ça lui rapporte des voix ». Le représentant de la droite préfère souligner le problème du « droit d’asile, une demande prévue pour durer 6 mois, qui dure parfois plus de 24 mois réels ». Le représentant du FN, légèrement effacé, ne semble pas avoir acquis l’approbation de la salle. Mais comme nous avons pu le constater, pas de débat poiitique sur l’immigration sans le légendaire « amalgame » ressorti à toutes les sauces ces dernières semaines… 

La réforme territorialeEnfin, l’un des derniers morceaux de choix de cette soirée riche en « petites phrases », le débat sur la réforme territoriale qui voyait s’affronter Jean Philippe Lamoure pour l’UDI, Céline l’Hostis pour EELV. Un débat qui est tout de suite entré dans le vif du sujet : les fameuses « clauses générales de compétences » non définies, tant dénoncées par la « véritable » élite politique ces dernières semaines, la droite en tête. « Je ne parle même pas du redécoupage des régions », tempête l’UDI, « décidé en catimini dans le bureau du Président de la République. L’UDI croit aux libertés locales, à la décentralisation », se fend l’étudiant, citant l’exemple de la métropôle lyonnaise. « Nous avons les élections départementales dans 3 semaines. Connaissons nous les compétences des départements ? Vous allez devoir vous exprimer le 22 et le 29 mars prochain sur quoi ? On n’en sait rien ». 

EELV dénonce un débat trop centré sur le redécoupage des régions. « C’est dommage car cette réforme est fondamentale et parle des objectifs, des compétences, des moyens alloués aux échelons locaux. On parle de refonder la démocratie locale et territoriale. Cependant, EELV a bien une approche de décentralisation, mais elle est davantage fédéraliste que celle des autres paris », déclare Céline L’Hostis. « On était plutôt satisfaits au début, mais la façon dont elle est mise en place est insuffisante dans l’autonomisation qu’elle donne aux échelons locaux ». Enfin, le PS avouait vouloir appliquer « un renforcement démocratique et une solidarité territoriale à toute épreuve. En ce temps de crise de nos institutions, je pense qu’il faut restaurer la confiance entre les citoyens et les élus. Nous prônons par exemple le non cumul des mandats ». Rires discrets dans la salle. « On prône aussi une parité effective. Il est évident que la démocratie ne va pas sans la solidarité, c’est ce que doivent porter les collectivités territoriales ». Tout en comparant le fameux « fédéralisme » voulu par les écologistes à ce qui est appliqué chez nos amis allemands, les jeunes représentants ont ainsi soutenu les idées de leurs partis respectifs, tout en évoquant entre les lignes la « blague » de la suppression du millefeuille administratif. Si chaque avis portait évidemment les stigmates de ses sensibilités, il reste dommage de ne pas avoir eu le temps de mettre en place une série de « questions des français », comme c’est souvent le cas avec les Présidents en exercice depuis quelques années. Sans doute une idée à mûrir pour les débats de la prochaine édition… 

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