L’AFDI (Agriculteurs Français et développement international) milite depuis de nombreuses années pour le développement de l’agriculture dans les pays les plus démunis. Ce mardi, elle a pris ses quartiers au sein du Salon de l’agriculture d’Aquitaine. Une délégation d’agriculteurs haïtiens est d’ailleurs accueillie en Aquitaine du 11 au 24 mai prochain par les agriculteurs et responsables professionnels agricoles aquitiains engagés dans le réseau AFDI, répartis en 14 agences régionales (soit plus de 6000 militants). Depuis octobre 2014, l’agence de Dordogne a démarré, avec le soutien de l’AFDI Aquitaine, un nouveau programme triennal. Marion Dufieu, chargée de mission pour l’AFDI basée en Haïti, nous en parle. « Ce programme fait partie de la coopération décentralisée de la région Aquitaine avec le Nord d’Haïti, et il cible 3 acteurs essentiels : les chambres d’agriculture, le réseau de coopératives caféières, et le réseau des coopératives de fruits et légumes », précise-t-elle.
Des conditions particulièresLes chambres d’agricultures d’Haïti sont particulières : « c’est essentiellement des regroupements d’associations paysannes, et il existe une chambre par commune », confie la chargée de mission. Pour Smith Metellus, vice-président de la fédération des chambres d’agriculture d’Haïti, les difficultés principales auxquelles les agriculteurs doivent faire face sont nombreuses. « Les besoins sont évidemment importants, notamment au niveau des semences. Il y a également sur l’île un très important problème foncier. Enfin, l’Etat a encadré la mise en place des Chambres, mais ne nous aide plus aujourd’hui ». Une agriculture locale qui est de plus bien spécifique, puisqu’elle est quasiment familiale (souvent pas plus d’un quart d’hectare et des jardins diversifiés). « Les agriculteurs haïtiens n’ont pas de revenus suffisants pour payer leurs dépenses de santé, et le métier d’agriculteur n’est pas encore reconnu là-bas », rajoute Marion Dufieu.
Pourtant, selon la chargée de missions, des efforts ont été fait depuis le début de l’implication de l’AFDI (même si une loi d’orientation agricole n’a jamais vu le jour en Haïti. « Une ferme de 3000 hectares s’est ouverte récemment au Nord, elle fabrique des bananes bio. Mais ce marché est beaucoup plus développé en République Dominicaine, qui emploie des haïtiens qui sont d’ailleurs non déclarés, dénonce-t-elle. Notre objectif principal, c’est de montrer les problématiques communes qui existent entre Haïti et la France, et qu’on s’attache aussi au développement des circuits courts (livraison des produits directement du producteur au consommateur, NDLR) et au développement des produits intérieurs ». Le tout dans un souci d’améliorer également les conditions des producteurs.
Des actions notables Il y a 4 ans, la fédération des coopératives cafetières a obtenu le certificat « bio ». Autre succès notable : le développement des espaces forestiers. A ce titre, un nouveau projet est en gestation depuis le mois d’octobre. Les 3 chambres d’agriculture de Limonade, La Victoire et Saint-Raphaël se sont d’ailleurs engagées dans le cadre du nouveau programme triennal à commercialiser plus de 100 tonnes de maïs par an avec le Programme Alimentaire Mondial. La présence de l’AFDI au sein du salon de l’agriculture d’Haïti n’a rien d’un hasard : les relations entre Haïti et l’Aquitaine étant assez étroites. C’est dans ce sens que la délégation présente ce mardi a pris la parole lors du cocktail de clôture des Assises de l’Origine, pour sensibiliser le public à leurs actions.
Le programme de l’AFDI ne s’arrête pas là. L’agence aquitaine et la Chambre d’agriculture de Dordogne organisent une conférence débat le mardi 19 mai prochain. Elle aura pour sujet « Les coopératives : un outil efficace pour une agriculture familiale performante sur les marchés », et confrontera les regards croisés d’Haïti, du Bénin et de la France. Les rencontres sont prévus de 14h à 16h30 au PIC de Périgueux, et permettra sans doute d’exposer plus clairement les difficultés quotidiennes auxquelles sont confrontées ces pays.
A noter enfin que François Hollande, présent en Haïti ce mardi, a été reçu dans une relative fièvre électorale. Pourtant, la France reste loin derrière dans le classement des principaux partenaires commerciaux d’Haïti : à hauteur de 1,5%, elle reste devant l’Allemagne (1%) mais derrière le Canada (2,2%) et à des années lumière des Etats-Unis (85,2%). Si la présence de l’AFDI au milieu des exposants et des producteurs prouve que, si les avancées sont là, elles sont timides et que beaucoup de chemin reste encore à faire.