En 2000, alors que la revue Etapes Graphiques sort unhors-série intitulé Emergence pour parler de la jeune création graphique en France,Franck Tallon figure dans les 30 agences sélectionnées. Les pieds dans les starting-blocks, il quittera Arc en Rêve en 2001, juste après l’exposition « Mutations », un gros événement sur « la ville et l’architecture » conçue par le centre d’architecture dans le cadre de la célébration de l’an 2000 en France. Un départ en très bons termes, pour se consacrer pleinement à son agence, et à son action avec Périphériques Architectes, un collectif d’archis parisiens qui conjugue architecture et médiation avec la revue IN-EX, soucieuse de montrer l’architecture sous un jour différent. Deux numéros édités et diffusés mondialement, en bilingue, par Birkhäuser, résulteront de cette collaboration. » IN-EX était vraiment un ovni dans le milieu de la presse en France. Détestée ou adorée, cette expérience a eu le mérite d’inventer » se souvient celui qui en fut l’un des acteurs. « On faisait des voyages en Australie, au Japon, en Chine autour d’une thématique pour montrer la réalité d’une ville. Un road movie, une aventure particulière où la mise en forme graphique et photographique avait autant de valeur que le fond, et représentait une vraie posture éditoriale chargée d’illustrer un propos ». Avec 32 interviews d’architectes sur 500 pages, tirés à 2500 exemplaires et diffusés à l’étranger (au Japon ce sont de vrais collectors) les 2 numéros seront suivis pour le graphiste, de plusieurs livres sur l’architecture et des productions d’architectes (Rudy Ricciotti, Jacques Ferrier, Philippe Gazeau…). On lui doit ainsi la seule monographie existante de l’architecte bordelais Jacques Hondelatte.
« Pour moi, l’exercice du livre d’architecture est une manière de poursuivre les recherches engagées avec IN-EX sur comment montrer l’architecture et la ville. Chaque livre est un dialogue, un scénario proche de celui d’un film ». Mais si Franck Tallon participe et oeuvre dans l’espace (signalétiques, scénographies, 1% artistique) il conçoit mais ne produit pas. « Je travaille avec des fabricants, artisans ou industriels avec lesquels je tisse un vrai réseau ». Une exigence qui explique le choix de Franck Tallon quant à son orientation qui lui a fait choisir le design plutôt que l’art. « Une bonne idée en soi n’est rien si elle n’est pas réalisable et duplicable, transposable dans un processus de fabrication industrielle ou artisanale. La bonne idée est celle qui au bout existe, en tenant compte d’un contexte, d’un budget, d’un programme… ». Une distinction qui inspire tout son cheminement et se doit de répondre à une question posée à partir d’un point de départ très concret.
En 2006, avec Jacques Ferrier, Philippe Gazeau et Louis Paillard, trois architectes parisiens, qu’il connait et dont il est connu car il passe son temps entre Bordeaux et Paris, il co-conçoit la scénographie d’Agora. Une chorégraphie d’images animées, présentée sur 42 écrans grand format. « Il s’agissait de penser la visite de l’exposition comme une expérience, plus que comme une simple visite. Une expérience visuelle autant qu’une expérience didactique. Un monde d’images au service d’un sujet intitulé » En ville comme à la maison ». Une expérience importante qui fera passer Franck Tallon du papier et du document imprimé à la mise en espace. Le papier qui reste, cependant, très présent dans son itinéraire avec la conception de la collection de poésie de la maison d’édition, Le Bleu du Ciel, et sa rencontre avec Xavier Rozan qui lui confie la refonte graphique de la revue Le Festin, dont il devient le directeur artistique. En 2009, un concours est lancé par la Région auprès de designers internationaux pour concevoir l’habillage des TER Aquitaine. En face de lui, il a Etienne Robial (Canal +) et Pierre DiSciullio, deux grosses pointures qu’il admire depuis toujours. Malgré la difficulté, il l’emporte, grâce à un projet qui, au-delà de l’habillage, mettra l’accent sur l’identité de la Région. A ce jour, trois prototypes ont été réalisés. L’habillage du parc complet reste à concrétiser. Au même moment, il conçoit, avec French Touch, un collectif d’architectes parisiens, un Annuel optimiste d’architecture qui se revendique comme un « complément » de l’annuel du Moniteur. A l’issue de cette initiative, le Ministère de la Culture lui confie la réalisation du pavillon de la France pour la 11ème biennale de Venise en 2008. Une consécration où il met tout son savoir-faire et qui lui ouvrira d’autres portes.