@qui ! : Comment définiriez-vous le pâturage tournant ?
Jean-François Bourjade : Le pâturage tournant consiste à adapter un potentiel d’herbe à un nombre d’animaux bien défini pour le respect de la flore. En clair, c’est faire brouter de l’herbe ni trop courte ni trop longue, juste à la bonne hauteur pour la préserver, car l’objectif est de faire pâturer de l’herbe au maximum de ses richesses. Grâce à ce procédé, beaucoup plus d’herbe pousse et elle est de meilleure qualité. Ainsi, la flore est préservée et plus équilibrée.
@qui ! : Quels sont les bienfaits du pâturage tournant sur vos bêtes ?
J-F Bourjade : Depuis que j’ai opté pour le pâturage tournant mes bêtes sont dans un meilleur état corporel c’est indéniable. Les mères sont plus fertiles et d’une manière plus régulière. Elles ont plus de lait. Et le fait d’être davantage présent parmi elles, cela rend le troupeau plus calme.
@qui ! : Quelles sont les conséquences économiques sur votre exploitation ?
J-F Bourjade : Même si deux années sont trop justes pour faire un premier bilan, il est certain que j’ai considérablement réduit mon utilisation d’engrais. Aussi, je sors les bêtes plus longtemps. Au lieu du 15 avril, elles sont dehors à partir du 10 mars ! Je fais donc moins de stock. Mes coûts de production sont donc réduits.
@qui ! : Pourquoi avez-vous opté pour ce procédé ?
J-F Bourjade : En 2011, j’ai participé à une réunion régionale où deux ingénieurs présentaient le pâturage tournant. J’ai déjeuné avec l’un de ces ingénieurs par la suite lors de l’assemblée générale de l’association des éleveurs de Dordogne. Là, je l’ai invité dans ma ferme pour qu’on étudie ensemble la faisabilité de ce procédé chez moi car cela m’intéressait énormément.
@qui ! : Aujourd’hui, y a-t-il un éleveur qui a assez de recul pour pouvoir mettre en avant les bienfaits de cette innovation ?
J-F Bourjade : Le premier éleveur à avoir mis en place dans sa ferme le pâturage tournant est un éleveur des Deux-Sèvres, il y a sept ans de cela. A l’époque, il allait mettre la clé sous la porte. Il a alors décidé d’adopter une nouvelle manière de travailler en optant pour le pâturage tournant. Aujourd’hui, il est à la tête d’une exploitation florissante. Il n’a plus de problèmes économiques et a considérablement réduit ses coûts en n’utilisant plus d’engrais. Il épand du fumier. Et il a beaucoup plus d’herbe qu’avant sur ses parcelles. Enfin, il prend un réel plaisir à travailler n’ayant plus de soucis financiers.
@qui ! : En mettant en place dans votre exploitation le pâturage tournant avez-vous du adopter une nouvelle manière de travailler ?
J-F Bourjade : Oui en effet. Cela a remis en question ma façon de travailler. Par exemple, avant je changeais les clôtures de place pour faire bouger les bêtes de pâtures. Cela me prenait près de 2h. Aujourd’hui, les clôtures sont fixes mais sont habillées de petits passages qu’on ouvre pour faire passer le troupeau. Notre méthode de travail est plus technique, plus rigoureuse et demande une certaine formation. Avant de se lancer dans le pâturage tournant nous devons suivre une formation – individuelle et en groupe – d’une année. Une formation qui nous permet aussi de rencontrer d’autres éleveurs et ainsi de faire naître une certaine émulation entre nous. Nous nous sommes rendus compte que de belles perspectives s’ouvraient à nous. Et nous souhiatons également en faire profiter le plus grand nombre. C’est pour cette raison que je participe à Innov’action et que j’ouvre ma porte à de jeunes éleveurs qui souhaitent s’orienter vers cette méthode…