Ils ont passé deux mois sans leur voiture


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Ils ont passé deux mois sans leur voiture

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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 02/03/2016 PAR Romain Béteille

Au moment où il existe une multitude d’offres de transports en commun, parfois méconnues, la question était simple : dans une grande Métropole comme Bordeaux, peut-on se passer totalement de sa voiture pour effectuer des trajets ? C’est en tout cas la question qui a été posée par Koollicar, petite entreprise originaire de Bègles spécialisée dans l’autopartage (échange de véhicules entre particuliers) et l’assureur Maïf au cours de l’opération #SansMaVoiture. Le principe : convier une cinquantaine d’inscrits entre Bordeaux et Niort (deux villes aux offres très différentes en matière de mobilité) à se séparer de leur véhicule pendant deux mois pour tester les « solutions de mobilité alternatives » comme l’autopartage, les transports en communs ou le vélo.

Cette phase de tests, qui s’est effectuée entre octobre et décembre 2015, a donc été un test grandeur nature pour 32 bordelais et 18 niortais (dont 60% de femmes), a ainsi donné des résultats plutôt encourageants. Ainsi, huit participants sur dix se sont déclarés prêts à abandonner leur voiture à plus ou moins long terme. C’est notamment le cas pour Chantal de Castelbajac, ortophoniste à Bordeaux. C’est mon mari qui a voulu tester, j’avais un peu d’appréhension au début », avoue-t-elle. « C’était un pari risqué, notamment à cause des enfants, mais ça s’est très bien passé pour nous, on a revendu la voiture depuis. On perdait un temps fou avec la voiture, les parkings de stationnement sont très chers, on a découvert les avantages que pouvait apporter la voiture électrique ».

Des obstacles de terrain

Cela dit, ce type d’expérience a bel et bien une limite, qui, pour cette participante, ne peut pas être franchie : « il faut vraiment être en ville parce que l’offre de transports en communs ailleurs est insuffisante. Certains bus ont des horaires qui changent en fonction de l’été ou de l’hiver… c’est un peu galère ». Pour Frédérique Lorentz, directrice marketing et associée chez Koolicar, cette expérience est tout de même concluante. « On aurait pu faire une étude quantitative avec un institut mais se projeter pour des choses comme ça, ça ne marche pas. On ne voulait rien prouver, on ne savait pas vraiment ce que ça allait donner, mais on voulait savoir quels étaient les leviers qui font qu’une agglomération peut réduire l’utilisation de la voiture. Ce n’est pas une petite société toute seule qui peut changer les usages. On a mis en place tout ça pour avoir une vraie expérience concrète avec des feedbacks qu’on aurait jamais pu avoir avec des projections ». 

L’opération a également permis de souligner les différences entre deux villes en matière de transports, et les faiblesses qui restent encore à exploiter pour la capitale girondine. « Ce qui est intéressant, c’est que Niort a vraiment un déficit de transports en commun, c’est compliqué de vivre là-bas sans sa propre voiture. On a bien vu que les niortais galéraient beaucoup plus que les bordelais », affirme ainsi Frédérique Lorentz, qui déplore un cruel « manque d’informations » sur les différentes alternatives au tout voiture. « Bordeaux est une ville moteur là-dessus, mais il y a encore beaucoup de choses à faire. Oui, il y a une volonté de réduire l’impact environnemental. Mais le problème, c’est que les gens n’ont pas de solutions et ne les voient pas. Il y beaucoup de stress sur l’abandon de son véhicule. L’auto-partage, le fait de prêter sa voiture a quelqu’un, ça fait encore assez peur, c’est un frein. L’offre n’est clairement pas suffisante dans une grande partie des villes, donc on s’est demandés ce que nous, en tant qu’entreprise privée, on devait faire pour répondre aux besoins. C’est la même chose pour les collectivités ».


Des conséquences concrètes

Le débrief de cette mini-expérience, enfin, a pu permettre à des responsables politiques de la métropole d’échanger avec les participants afin d’avoir un retour « sur la réalité du terrain et sur ce qu’ils pouvaient mettre en place pour améliorer tout ça ». On a eu des retours comme quoi certaines bandes cyclables étaient prises par les voitures en stationnement. On va aussi travailler là dessus », souligne Brigitte Terazza, maire de Bruges et responsables de mobilités à la Métropole. Plus qu’un simple jeu, l’opération « sans ma voiture » a été un véritable terreau d’expérimentations pour certains décideurs publics, même si elle n’avait rien d’institutionnel.

A tel point qu’elle a fait des émules et suscité l’intérêt d’autres grandes villes de France pour renouveler l’opération en 2016. Trois villes (au lieu de deux) pourraient être concernées par le défi cette année. Et la jeune entreprise n’exclue pas de voir un peu plus grand : « il y a clairement une volonté de certaines villes de mieux comprendre les usages et de participer à l’opération. On ne va pas aller tout de suite démarcher le gouvernement pour entreprendre ce genre de choses. Peut-être que dans deux ans, on le fera avec la mairie de Paris à très grande échelle mais on ne veut pas aller trop vite ! »

Une réelle alternative ? 

Cela dit, même à petite échelle, l’opération a déjà prouvé une chose : sur la métropole hors de Bordeaux, il reste encore des progrès à faire en matière de mobilité. « Sur les participants bordelais, on a eu une seule personne qui ne faisait pas partie du centre-ville de Bordeaux », déclare la responsable. « Tous ceux qui étaient en dehors de la ville n’ont pas participé parce qu’ils n’ont pas de moyens de transports. Pour eux, c’était impossible. On a donc voulu alerter Bordeaux Métropole en leur disant qu’ils avaient des envies de mobilité douce mais pas forcément les moyens de le faire ».

A l’occasion de la semaine des mobilités, en septembre dernier, la métropole a rappelé la multitude d’initiatives développées par différents acteurs, qui vont dans le même sens que l’opération « sans ma voiture ». Comme l’application mobile ECOWEEGO qui a pour ambition de créer un réseau local de co-voiturage (pour des trajets plus petits) ou, plus politique, le Club de la Mobilité, créé en 2010, qui compte aujourd’hui 35 PDE (Plan Déplacement Entreprise) et intéresse environ 40 000 salariés au niveau métropolitain. « Sans ma voiture » n’est donc qu’une goutte d’eau, mais qui, même à petite échelle, compte bien montrer qu’une alternative est possible. 


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