Aqui! : Vous avez battu Alain Juppé aux législatives…
Michèle Delaunay : … et nous espérons recommencer…
@:…comment s’annoncent les municipales?
M.D : Je ne suis jamais formidablement optimiste, c’est à dire que je ne vends pas de la soupe ; je pense qu’elles s’annoncent difficiles mais on peut gagner. En y mettant beaucoup de travail, en étant très intelligent, en ayant l’esprit collectif, en choisissant celui et celle qui ont leplus de chances de gagner. Et surtout en jouant collectif, en étant parfaitement unis, ce qui n’est pas toujours une des qualitésprincipales du PS à Bordeaux comme sur le plannational. Donc je pense que c’est faisable si on est vraiment très bon. On dit toujours: nous gagnerons si nous sommes les plus forts et je pense que c’est possible. Donc actuellement j’y travaille personnellement, je prends des contacts, j’essaye d’y apporter ce que je peux. Je crois et j’espère que nous aurons une équipe à présenter d’ici fin septembre.
@:Vous avez des noms peut être…
M.D: Je vais le dire…Je pense que ce qui a le plus de chance de l’emporter actuellement c’est un binôme Rousset-Delaunay avec autour bien sur tous les autres du PS. C’est pas fait, c’est ce que je croisle plus porteur si c’est accompagné des autres personnalités fortes du parti local qui représentent des territoires et deuxièmement au sein d’une liste ouverte à la fois aux verts, aux quelques éléments ducentre qui le souhaiteront-le centre le plus éclairé-aux communistes bien sûr et à la société civile.
@: C’était une victoire surprise ?
M.D: C’est vrais on ne me donnait pas gagnante. Je vais vous confier queje disais même toujoursà mon équipe : nous avons 5% de chance maissi nous gagnons, c’est le jackpot.
@: Effectivement, nous étions à la mairie le soir des résultats: ilsont recompté 5 fois, ils n’y croyaient pas mais comment expliquezvous cette défaite d’Alain Juppé? Il a eu des mots durs quand Royal estvenue vous soutenir, il aurait déclaré « on ne tire pas sur une ambulance ».
M.D: Je pense que ça a était très maladroit de sa part, il ne fautjamais mépriser l’adversaire, ça a été l’exemple. Vous savez je penseque toutes les élections dépendent d’un concours de facteurs ; AlainJuppé a fait des erreurs.
@ : Le fait aussi qu’il ait dit qu’il ne siégerait pas…
M.D: Voila, c’était une erreur après avoir provoqué une municipaleanticipée et dit qu’il se consacrerait désormais à sa ville pourrepartir 6 mois après à Paris mais… je crois que nous avons faitsurtout une campagne de terrain, très crédible, sans agressivitécontrairement à Alain Juppé et que ceci compte car on a bientravaillé. Mais c’est conjonction d’éléments, il y a aussi le sursautnational, je crois que ce n’est jamais monofactoriel. C’est pour ça queje trouve que l’on pourrait faire mieux que faire toujours dudiagnostic, je crois qu’il faut toujours se porter dans l’enjeusuivant et l’enjeu suivant, c’est vrai que ce sont les municipales. Etl’enjeu suivant c’est surtout apporter aux français des propositionsconcrètes même si nous ne sommes pas au pouvoir. Il ne faut jamais faire une critique sans dire mais nous, que ferions nous ?
@:Justement vous étiez à Melle pour la rentrée politique de Royal
M.D:J’ai eu un rôle politique extrêmement fort, je lui ai apporté desverres d’eau (rires).
@: Là nous sommes à la 15ème université d’été du PS dont le mot d’ordreest « Diagnostic pour la rénovation, » quel rôle voulez-vous jouer danscette rénovation?
M.D: Je souhaite beaucoup y apporter mon grain de sable en amenantdes idées et en essayant de les mettre en phase avec le XXIèmesiècle. On disait autrefois que les socialistes défendaient la veuve etl’orphelin, mais il n’y a plus d’orphelins et les veuves ont bienchangé. Il faut que nous nous remettions d’avantage en phase.
@:Vous avez l’impression que le PS doit passer directement du XIXéme
au XXIème siècle ?
M.D: Non. Je pense qu’il n’a pas suffisamment abordé les problèmes avecle langage (même si ce n’est qu’un aspect) et surtout la prise deconscience de ceux qui sont maintenant les problèmes nouveaux. Il y aeu par exemple un bon atelier sur le marché. Il est bien évident que
les socialistes vivent au sein d’une économie de marché. Il nous fautdonc trouver comment il peut être générateur de redistributions et derégulations mais ce n’est plus la peine de se battre sur le fait qu’ily a une économie de marché, c’est une réalité et c’est d’ailleurs ceque nous souhaitons : l’étatisme soviétique, c’est pas notretruc. Rénovons les vieilles lunes ! Mais aujourd’hui à La Rochelle, jetrouve qu’il y a trop de diagnostic. Moi, je suis entré au PS en 2002 etdepuis 5 ans on fait du diagnostic ! Alors je suis médecin et je pensequ’on doit arriver un jour à la thérapeuthie, autrement le malade esttrès malade. J’exagère, on a fait des propositions, on a un programme
mais c’est à dire vraiment être plus concret. Et ça ça ne se fait pas en faisant ce que je fais maintenant : dire on va le faire, on va le faire mais en le faisant.
@:Du réel dans l’opposition aussi…
M.D : Voila : critique et contre mesure. Vous savez, il y a de quoicritiquer. Le 4 août pendant la révolution, les privilèges ont étéabolis. Eh bien on est en train de les rétablir. Par exemple, le
privilège de la naissance en exonérant les droits de succession. Onpeut avoir la fortune sans le mérite mais ce n’est rien à monsens. Donc vous voyez, il y a des questions à poser autrement. Je penseque les français n’ont pas compris les droits de succession. Déjà 40%des français étaient légitimement exonérés. Mais quand Sarkozy parled’aider les propriétaires des « petits pavillons de banlieues », enréalité c’est pour les patrimoines déjà très gros. C’est comme ça qu’ilfaut qu’on parle, avec des chiffres aussi. Je crois que nous avons fortà faire. Pour nous faire entendre d’abord car les médias ne sont pasmajoritairement prêts à nous écouter sur les vrais sujets. On nous écoute pour savoir si Strauss Kahn est ici, si Fabius…
@ : C’est vrai qu’il n’y a pas grand monde !
M.D : Mais on s’en fout (Deux fois avec le sourire). S’ils veulent pasvenir, c’est qu’ils ne veulent pas travailler avec nous. L’éléphant est làpour se montrer au lieu d’être dans les séminaires avec nous. ça n’apas d’importance.
@:La question du leadership a une importance aussi.
M.D : Oui mais… Je n’attends pas de La Rochelle qu’il y ait la fuméeblanche qui sorte, c’est pas l’élection du pape ! C’est essayerd’intéresser les médias et les français à un autre modèle de société.
@:A titre personnel, vous avez désormais l’étiquette « tombeuse d’Alain Juppé ». Comment vivez vous cette image?
M.D : Pas bien. Je vais essayer de l’inverser. C’est normal, Alain Juppé afait énormément pour ma (hésitation, elle rougit etsourit) renommée. C’est vrai que ça donne plus de renommée que de battreJulien Tartampion. C’est certain mais il ne faut pas en rester là, lesbordelais m’ont fait confiance. C’était une grande audace que d’élireune femme politique qui n’en fait seulement que depuis cinq ans, plutôt qu’unhomme politique extrêmement chevronné. Donc je vais essayer non pas de surprendre mais de leur rendre cette confiance.
@: Vous aviez eu des mots de compassion pour lui quand il s’étaitemporté face aux journalistes du salon du vin « SI je pouvais crever, ça vous ferait plaisir ».
M.D : Ce n’était pas de la compassion mais du respect. Je trouve quec’est toujours difficile de perdre. J’ai regretté qu’il quitte sonposte de ministre. A mon avis, il ne faut pas mélanger les scrutins.
@:Vous pensez que cette règle était ciblée contre lui ?
M.D : Je vais vous répondre autrement, je pense que si le président dela République avait voulu ne pas accepter sa démission, ce n’était pas difficile.
Propos recueillis par Paul Larrouturou et Morgan Marietti