Entre les lignes : quel futur pour la métropole bordelaise ?


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Entre les lignes : quel futur pour la métropole bordelaise ?

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Temps de lecture 6 min

Publication PUBLIÉ LE 13/06/2019 PAR Romain Béteille

BM2050

La métropole se projette

La prospection était évidemment le sujet central de toutes les initiatives du programme égréné pendant plusieurs mois au travers de BM 2050. Ce « kilo gratuit », disponible pour les habitants qui en feront la demande à l’hôtel de Bordeaux Métropole, constitue la somme des quelques 2000 contributions retenues pour y figurer et élabore en quatre parties (éveiller, contribuer, débattre et enfin les scénarios et propositions émergeantes) un panorama assez complet de cet exercice de prospective qui a mobilisé assez largement autour de lui. Pour le président de Bordeaux Métropole, Patrick Bobet, « faire le distinguo entre l’urgence du jour et la projection n’est pas si compliqué. Le grand changement qui est en train d’émerger, c’est celui de la démocratie participative. Aujourd’hui, prendre des décisions sans concertations serait tout à fait impensable. Nous avons mobilisés plus de 520 000 personnes lors des différents temps de concertation, 50 000 habitants ont participé au serious-game et 15 000 questionnaires ont été recueillis auprès de personnes de tous âges et milieux sociaux. Maintenant, il faut s’en servir, quelques idées sont bonnes à prendre tout de suite, d’autres dans un temps plus long ».

« Nous avons un adn local et une capacité à évoluer collectivement. Le foisonnement de la gouvernance partagée a permis de faire avancer de grands dossiers, il serait paradoxal que rien de ce qui est sorti de BM 2050 ne soit utilisé dès maintenant », a pour sa part ajouté le maire de Bordeaux, Nicolas Florian. Pour Jacques Mangon, maire de Saint-Médard-en-Jalles et en charge de BM 2050, « le point commun entre les gilets jaunes et BM2050, c’est qu’ils ont montré le grand pouvoir d’attraction de Bordeaux et le besoin de penser à la périphérie. La question sera de savoir comment cette périphérie métropolitaine peut apporter à la dynamique globale de la métropole ». Les contributions partagées dans cet ouvrage massif sont larges : de l’autonomie alimentaire à l’école, de l’urbanisme aux boulevards, de l’emploi à la mobilité. Elle ne se termine pas par un point final mais plutôt par une ouverture réalisée par Jacques Mangon.

Quatre scénarios, tous très larges, se dessinent : une métropolisation « qui continue et s’autorégule » (avec des conséquences : prix de l’immobilier en hausse, « étalement urbain, conséquences sociales), une « exigence décarbonée qui règle la ville » (interdiction des véhicules thermiques, des voitures diesel, logistique urbaine dense et en hauteur pour éviter l’étalement, bannissement du béton…), une « nature qui redessine la ville » (développement raisonné autour des 28 000 hectares de nature, « central park métropolitain », organisation plus souple des mobilités et transformation de la nature en vraie stratégie politique) et enfin un « équilibre des territoires qui fait la vie » (réseau de RER, échanges plus souples avec les villes moyennes, réaménagement de l’estuaire, le tout après une « nécessaire réorganisation budgétaire et administrative »). « Nous ne savons pas de quoi sera fait BM 2050 mais ce qui est sûr, c’est que nous en seront les artisans », conclue l’exercice, dans lequel on retrouve une somme assez foisonnante de réflexion. S’il ne dresse pas un panorama complet de la métropole et de son avenir, il permet en tout cas de dresser un portait assez dense de toutes les réflexions ayant animé ces mois de débats. Et rien que pour ça, il risque de fortement intéresser tous ceux qui y ont participé… et tous ceux qui, peut-être, en espéraient un résultat.

Vincent Feltesse

Besoin de rupture

Le second ouvrage, présenté à la station Ausone à l’occasion d’une dédicade de Vincent Feltesse organisée ce mercredi 12 juin, est évidemment bien plus politique. Il correspondrait presque aux prémices de la campagne municipale d’un candidat qui, s’il ne s’est pas déclaré, s’agite déjà pour définir des priorités à venir. Une dizaine de personnes a participé à sa rédaction, toutes font bien évidemment partie du collectif citoyen « Bordeaux Métropole des Quartiers » initié par l’ancien candidat aux municipales et président de la Communauté Urbaine de Bordeaux entre 2007 et 2014. Ce dernier en signe d’ailleurs l’introduction et la conclusion, en y ajoutant quelques idées qui risquent de faire les beaux jours de la prochaine campagne dans les semaines à venir. « C’est un livre qui définit un projet pour la métropole bordelaise avec des choix de changements assez radicaux. Le nouveau maire de Bordeaux s’est déjà planté sur le BHNS, la journée « Bordeaux ville morte », il a fait quelques approximations. Ce que je peux reprocher à la majorité, c’est de ne pas avoir anticipé la flambée des prix et les problèmes de logement. L’opposition propose depuis longtemps des outils pour maîtriser le foncier mais pour des raisons internes, Alain Juppé a refusé et on n’a pas vraiment avancé, ce que l’on paye aujourd’hui très cher. Le maire a été longtemps frileux sur les logements sociaux, aujourd’hui ça nous rattrape ». 

Au travers des différentes entrées de l’ouvrage, qui n’hésite pas à comparer la métropole avec d’autres grandes villes de France ou d’ailleurs (Taïwann, par exemple), intitulé « 783 001 : Bordeaux, la métropole » (en raison de son nombre d’habitants), Vincent Feltesse se prête volontiers des envies de « rupture ». « Rien ne serait plus terrible qu’une sorte de continuité affadie », écrit l’élu qui a pris ses distancs avec le parti socialiste, préférant plutôt une « utopie réalisable ». Il propose également un « moratoire avec effet immédiat sur toutes les grandes opérations de la rive droite et de Bordeaux-Nord pour permettre à minima aux infrastructures de se mettre en place. Peut-être le gel de toutes ces opérations ». Parmi les autres propositions fortes, on comptera notamment un pacte « eau/nature/énergie » pour aider la métropole bordelaise dans ses ambitions zéro carbone, développer la voie ferrée de ceinture, réfléchir à un péage urbain et même supprimer les voitures « entre Garonne et Tourny/Gambetta et Victor Hugo et Arnozan ». « L’idée serait d’étendre la zone piétonne au centre de Bordeaux sur l’équivalent du périmètre de l’opération « dimanche sans voiture » et d’enclencher la suppression progressive du stationnement de surface, pas pour supprimer complètement l’automobile mais plutôt améliorer l’utilisation de l’espace public, ce stationnement représentant un tiers des rues. Cela nécessitera évidemment de nouvelles infrastructures », précise d’ailleurs Vincent Feltesse, qui prône un « grand-débat » et un référendum local sur trois sujets centraux : la gratuité des transports publics, le développement de l’aéroport et la possibilité d’un métro. Un début de programme ? Certainement, d’autant que, tout comme la conclusion de BM 2050, l’élu d’opposition ouvre des pistes plus qu’il n’en ferme. 

Le dernier point commun entre les deux initiatives, on l’a relevé dans les propos combinés de Vincent Feltesse et de Patrick Bobet : et si la métropole élisait ses membres plutôt que de placer les maires des communes qui y sont affiliées ? « Si on veut continuer à bien vivre, ce n’est pas en continuant les recettes d’avant. Je trouve incroyable que les maires soient ambassadeurs de leur propre ville au sein de la métropole et que les habitants ne puissent pas choisir les représentants de cette collectivité qui gère tout de même un budget de plus d’un milliard et demie d’euros », dénonce le premier. « Pour un suffrage direct, je pense qu’il est trop tôt. Nous ne sommes pas prêts, mais on y viendra. Le fait que ce soit des maires qui siègent à la métropole est parfois un pousse-au-crime et à la dépense, nous avançons donc petit à petit dans cette direction », contredit le second sans fermer la porte. Le maire de Bordeaux, lui, tranche quelque part entre les deux : « nous ne sommes pas un guichet, nous ne faisons pas de troc entre nous. C’est la volonté collective qui prime ». Le mot de la fin sera pour Jean de la Fontaine, cité au sein du livre de BM 2050 : « Ne faut-il que délibérer, la cour en conseillers foisonne. Est-il besoin d’exécuter, l’on ne rencontre plus personne ».

« BM2050 commence aujourd’hui » (gratuit, édité par Bordeaux Métropole)

« 783 001* : Bordeaux, la métropole » 15 euros, éditions confluences)

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