« Les hommes ne savaient pas s’ils seraient toujours vivants le lendemain ». C’est sur un extrait poignant d’une interview, enregistrée au préalable par o2 Radio, du président du Secours populaire et résistant Julien Lauprêtre que l’émission 4 médias a démarré. Car les multiples acteurs de la résistance, aux profils bien plus diversifiés que l’on ne le pense généralement, avaient tous en commun de se battre pour l’honneur de la France, et ce malgré les menaces de leurs actes sur leur survie personnelle.
Des représentants du Parti communiste, des membres du MRP, à droite, mais aussi des socialistes, des francs-maçons, la résistance n’avait pas un visage unique. Impulsée par de Gaulle en 1943, la fondation du Conseil National de la Résistance (CNR), dont Jean Moulin fut le premier président, tâcha de coordonner toutes les résistances, « pour inventer un futur commun », selon Jean Lavie.
Fils d’un résistant des Forces Françaises Libres (FFI), Jean-Michel Meyre défend avec vigueur la pérennité du programme établi par le Conseil National de la Résistance en 1944, et joliment intitulé « Les jours heureux ». Retraite, sécurité sociale, liberté de la presse, nombre de ses principes ont été fondateurs de la société dans laquelle nous vivons aujourd’hui. Celui qui est aussi bénévole au Secours populaire s’interroge sur la remise en question de certains d’entre eux avec les réformes actuelles, notamment l’augmentation de la CSG pour les retraités et la réforme de la SNCF.
« Nous devons être des passeurs d’histoire », assure Jean-Michel Meyre. Quid du devoir de mémoire ? Il est toujours bien présent, selon Jean Lavie, ancien président de l’association des 256 fusillés des camps de Souge. « Quand on demande aux jeunes qui viennent visiter le mémorial de Souge ce qu’il faut retenir de tout cela, ils disent automatiquement : rendre hommage et éviter que cela se reproduise », explique-t-il, heureux de constater que le souvenir de la guerre parvient à se transmettre de génération en génération. 256 résistants ont été fusillés à Souge, dont la moitié était des Aquitains, mais aussi neuf Espagnols et six Ukrainiens.
Reconnaissance tardive et combat philosophique
Moins positive, la présidente de l’Amicale des anciens guérilleros espagnols en France, Laure Lataste, assure que certaines choses ont été reléguées au second plan. Ses parents sont arrivés en France en 1939, et ont dû attendre une semaine avant de pouvoir entrer sur le territoire français, avec la menace des troupes de Franco qui arrivaient à la frontière. Ils ont échappé aux camps de concentration du sud de la France, car son père était Français, mais d’autres n’ont pas eu cette chance. Entourés par des barbelés avec du pain balancé depuis des camionnettes par les soldats, ces endroits insalubres, proches de la mer, étaient invivables.
« Assumons notre histoire », plaide Laure Lataste. Elle cite également le résistant Pablo Sanchez, Espagnol qui a permis de sauver le pont de pierre de Bordeaux du dynamitage allemand. Celui-ci n’a été distingué que le 3 septembre 2014, une reconnaissance tardive inadmissible, selon elle, mais aussi liée au fait qu’il fallait prouver que les personnes étaient mortes les armes à la main pour obtenir la distinction « mort pour la France ».
Dans la France de Vichy, la résistance soulève aussi une question philosophique : comment réussir à dire « non » face à un pouvoir établi ? En musique, l’émission s’est achevée par la diffusion de « L’affiche rouge », interprétée par Léo Ferré, en référence à l’Affiche rouge placardée par Vichy en France, où les noms des vingt-trois résistants des Francs-Tireurs et Partisans – Main d’œuvre Immigrée (FTP-MOI), étaient inscrits. Ils ont été fusillés par Vichy en 1944.