Un éperon rocheux qui domine le gave. Une vue qui porte loin sur un pays crénelé par les Pyrénées. L’origine du château de Pau ne diffère guère des multiples édifices construits jadis en Béarn pour faire face à d’éventuelles invasions. Car, pendant des siècles, les menaces n’ont pas manqué.
Motte féodale devenue forteresse médiévale, le site a été rénové au 14e siècle par l’ombrageux et flamboyant Gaston Fébus, comte de Foix et vicomte de Béarn.
Pau, c’est d’abord Henri IVAussi rude guerrier qu’habile diplomate, celui-ci était aussi un Béarnais dans l’âme : capable de cultiver jalousement son indépendance tout en résistant au pouvoir des grands de ce monde. Qu’il s’agisse du royaume de France ou de celui d’Angleterre. A bien y regarder, ce trait de caractère a laissé des traces de nos jours dans certaines attitudes politiques locales.
N’en déplaise à ce prince écrivain, auquel on doit également un extraordinaire « Livre de chasse », le château de Pau, c’est pourtant, c’est d’abord… Henri IV. Un roi auquel un spectacle son et lumière gratuit rend un bel hommage en ce moment, dès que la nuit tombe.
Présentée chaque soir en août dans la cour d’honneur, sur des façades ornées de fenêtres Renaissance, cette évocation dure huit minutes. Autant dire qu’elle va à l’essentiel : la naissance du prince, son enfance, son mariage avec Marguerite de Valois, que l’on a appelé la reine Margot. Mais aussi le massacre de la Saint Barthélémy commis une semaine après les noces, la conversion au catholicisme du Béarnais protestant, suivie de son renoncement et d’une terrible guerre civile. Puis le retour de la paix et un règne marqué par la célèbre formule qu’employait Sully, ministre et ami du roi : « Labourage et pâturage sont les deux mamelles de la France ». Tout cela se termine évidemment sous le poignard de Ravaillac, exalté, intolérant et Angoumoisin.
Des symboles qui demeurentAutant de faits historiques qui permettent d’établir un parallèle avec certaines de nos grandes problématiques actuelles, estime François Bayrou. Qu’il s’agisse des affrontements civils ou de la diversité des religions.
Maire de Pau et auteur d’un livre consacré à Henri IV, qu’un sondage a désigné comme le roi préféré des Français, celui-ci a en fait souhaité recentrer sur ce personnage le son et lumière réalisé par la société Skertzo. Un spectacle dont l’idée et les équipements avaient été achetés par l’ancienne municipalité, mais en adoptant une formule plus large et en comprenant une balade dans les jardins qui entourent le château.
De toute évidence, cette proposition est appréciée par le public. Même si parfois, certains commentaires ne manquent pas d’humour : « C’est nul. On le tue à la fin » confiait ainsi dimanche, une dame en sortant de la cour d’honneur.
Morlanne, la protectricePau est certes « capitale », comme aime à le rappeler son premier magistrat. Elle n’est pas pour autant le centre du monde. Plus loin, vers le nord-ouest, le donjon du château de Morlanne offre, lui aussi, une vue extraordinaire sur les montagnes et les moutonnements du piémont béarnais.
Telle une sentinelle faisant face à l’ancienne Gascogne anglaise, le site a été construit en 1373 sur ordre de Gaston Fébus, et confié à Arnaud-Guilhem, le frère de ce dernier. Avec d’autres forteresses, comme celle de Montaner, il était chargé d’assurer la protection du Béarn.
Le temps est hélas assassin et il a fallu attendre l’après-guerre pour voir Raymond Ritter, un homme de lettres et amateur d’art palois, chercher à redonner vie à cet édifice qui menaçait ruine. D’importants travaux réalisés pendant plus de deux ans par le Conseil départemental, son nouveau propriétaire, ont permis de poursuivre cette tache de longue haleine. Ils se sont montés à 2,75 millions d’euros.
Ascenseur, escaliers neufs… Des concessions ont été faites ici à la modernité. Depuis le début juillet, elles permettent cependant à tous les publics, y compris handicapé, d’avoir accès à l’édifice et à son chemin de ronde. Un lieu auquel on accède dans le village par une rue aussi pittoresque que gourmande. David Ducassou, l’un des cuisiniers les plus talentueux de la région, a installé là son restaurant : le Cap E Tot. La salle, qui englobe un quillier, vaut à elle seule le déplacement. Saveurs et finesse font le reste.
Le sang et l’or venus de NavarreArrivé au château, la curiosité est à chaque pas. Des briques plates disposées en « arêtes de poisson » pour assurer l’étanchéité des murs aux énormes clous destinés jadis à protéger la porte principale des coups de bélier. Du chemin de ronde surplombant une cour intérieure où l’on vient de retrouver les traces d’une tour disparue au donjon sur lequel flottent les couleurs sang et or du Béarn. Ce symbole a été apporté de Navarre par Marguerite de Moncade, l’arrière-grand-mère de Gaston Fébus.
Viennent enfin les doubles douves qui cernent l’enceinte et le jardin à la française où la sauge côtoie l’absinthe, tandis que la camomille pousse auprès de l’hysope.
Autre ambiance, autres plaisirs. Le Béarn se déguste à petites touches.
Pour en savoir plus :
http://chateau-pau.fr
http://www.tourisme-aquitaine.fr/fr/visiter/patrimoine-culturel/pyrenees-atlantiques/morlanne/chateau-de-morlanne.html