La détermination d’Alain Rousset, le soir des législatives, après le succès de MIchèle Delaunay face à Alain Juppé, semblait telle que d’aucuns le voyaient dèjà partir à l’assaut du Palais Rohan à la faveur d’un duel au sommet contre l’ancien premier ministre. Mais, entre le rêve et la réalité, il y a place pour une analyse sérieuse de la situation, une évaluation des chances de succès face à un maire dont certains aspects du bilan peuvent être contestés mais dont il ne viendrait à l’esprit de personne de nier le mérite qui est le sien dans le renouveau de Bordeaux.
Le double choix de Rousset
Y aller ou pas? En renonçant à la présidence de la Communauté Urbaine, pour conserver la présidence du Conseil Régional d’Aquitaine, Alain Rousset a fait un double choix: garder la haute main sur un lieu d’influence où il s’est entouré d’équipes de qualité et, du même coup, continuer à assurer la présidence de l’ARF, l’Association des Régions de France. Un espace où il cotoie ses pairs avec l’ambition de faire avancer le débat sur la décentralisation, tout en fortifiant l’image qu’il a longtemps cherché à construire d’un élu reconnu dans le cercle parisien du pouvoir. Renoncerait-il à tenir cette position, au moment où le PS a besoin de têtes nouvelles? Comme on n’imagine pas qu’il abandonne son siège tout frais de député, il faut croire qu’il ne se lancera pas, tête baissée, dans une aventure incertaine, au risque de connaître face à Alain Juppé, si celui-ci se représente, une défaite lourde de conséquences pour les suites de sa carrière politique. Une autre dimension à pareille candidature réside dans les ressorts psychologiques de celui qui s’y engage : Alain Rousset a-i-il vraiment envie d’en découdre avec Alain Juppé ? Le doute est permis à cause de ce que l’on pourrait comprendre comme une certaine fascination.
Dorthe ou Delaunay ? Le ticket…
A gauche dans les rangs du PS un élu, lui, ne doute pas. Il s’appelle Philippe Dorthe, est conseiller général de Bordeaux, en charge du tourisme, mais surtout le « commandeur » de la rive droite, l’homme qui monte au créneau pour défendre le patrimoine maritime de Bordeaux et pousse, quand il le faut, la porte d’Alain Juppé pour tenter de le convaincre. Et reconnaître les lieux. Philippe Dorthe a la foi des autodidactes, ceux qui croient en leur étoile, et veulent se donner les moyens de gagner. Il a pris, au coeur de l’été, le chemin de Tulle pour faire part à François Hollande de son intention d’être candidat, à tout le moins à la candidature. Le communiqué qu’il a diffusé à l’issue de cette rencontre est suffisamment ambigu, en particulier au sujet d’une éventuelle candidature d’Alain Rousset, pour que l’on comprenne que l’homme se tient prêt. D’ailleurs, il pourrait se lancer dans la bataille dès les premiers jours de septembre, conscient que pour lui, plus encore que pour Alain Rousset ou Michèle Delaunay, la campagne sera de longue haleine. Il a constitué, il y a plusieurs mois, un groupe de travail dont les membres, venant de plusieurs horizons, nourrissent son approche d’une campagne électorale municipale. Il serait surprenant qu’il ne fasse pas le maximum pour conduire la liste de gauche. Et s’il n’a pasla légitimité que Michèle Delaunay a décrochée en battant Alain Juppé, il dispose du soutien d’un nombre respectable de militants. Seule l’entrée en lice d’Alain Rousset semble de nature à le dissuader d »y aller ». Pourrait-il s’effacer si Michèle Delaunay se lançait dans l’aventure face à Alain Juppé? Encouragé dans cette voie par Hollande, il parle volontiers de faire un « ticket » avec elle. Cette option, pour avoir la moindre chance de voir le jour, suppose qu’au préalable quelques figures socialistes de Bordeaux consentent à réviser leur jugement sur les qualités et les défauts du candidat Dorthe.
J.A