Du rythme. La légèreté de la musique de Donizetti. Un livret plaisant qui en dépit de son côté 19e siècle, peut être perçu comme un clin d’oeil à certains comportements contemporains. La mise en scène décapante de Stéphane Alvarez qui rappelle celles d’Olivier Desbordes(Opéra Eclaté) contribue, quant à elle, à ajouter du piquant à ce petit opéra comique que commit Donizetti sur ses vieux jours. Le coup du poulet vivant-mort, dont les plumes s’envolent lors de la première scène, et qui réapparait tout empluméà la dernière, révèlesans doute pour la première fois le recours à la prestidigitation dans la mise en scène d’opéra. La planche de surf, ainsi que le seau d’eau qui gifle de façon impromptue le ténor (Christophe Belliveau, Pépé, le deuxième mari ) en plein milieu d’un récitatif, accentuent le comique d’une pièce dont le déroulement se situe entre mer et paillote. Rita (Christelle Belliveau)la patronne de l’auberge bat son deuxième mari mais un jour le premier, Gasparo (Bernard Causse)que l’on croyait mort réapparait . C’était celui qui autrefois la battait en criant « je châtie autant que j’aime et j’aime fort! ». Au piano Elisabeth Thiplouse assure de façon enlevée l’accompagnement musical dans le cadre de la direction musicale réglée par Eliane Lavail, et souligne parfaitement le jeu très théatraldes chanteurs-acteurs, ainsi que les voix très homogènes des trois interprètes.Un regret cependant, sans ternir le talent de l’excellente pianiste: l’absence d’un petit orchestre de chambre. Ah! les violons….!
D’autres rendez-vous
Rita ou le mari battu qui est une co-production du Théatre du Pont Tournant et de Polifonia Eliane Lavail,et que Stéphane Alvarez espère « vendre » un peu partout en France ou dans les pays francophones, sera donné les 17,18 et 19 janvier au Théatre Monte-Charge à Pau , et les 14 et 15 juin au théatre le Pari à Tarbes.Le rideau ne tombe pas cependant sur le thèatre du Pont Tournant. Du samedi 24 au samedi 26 janvier ce sera » Les Beautés inutiles » une adaptation avec danse et musique de quatre nouvelles de Maupassant par la compagnie toulousaine Lever du jour; du jeudi 31 janvier au samedi 2 février, le « Barbier Shop Quartet » (style vocal né aux Etats-Unis); le samedi 9 février « le Quintette Amazone ». On trouvera tous les détails de la saison sur le site « théatre-pont-tournant.com. »
Pour que cela ne tourne pas mal
Stéphane Alvarez ne cache pas, cependant, que cette fin de saison risque d’être dure financièrement pour le théatre bordelais si ses appels à l’aide ne sont pas entendus. La salle, en dépit de la qualité de sa programmation et du nombre des spectateurs, nevit que grâce aux recettesexternes de la Compagnie. Si la direction du théatre est bénévole, ce sont quelques 5 emplois permanents, la contribution d’une trentaine d’intermittents, et les charges afférentes à la salle qui sont à assumer.Voici quelques mois le Pont Tournant était au bord du gouffre, après que sa banque eut décidé de couper les crédits. Il s’est trouvé cependant 7000 personnes pour signerune pétition qui demande la survie et le soutien de ce théatre qui, souligne Stéphane Alvarez, « reçoit 20 fois moins d’aide publique » que ses semblables bordelais. L’appel a été entendu par la mairie de Bordeaux – Alain Juppé est d’ailleurs cité dans Rita- quia accepté de prendre en charge la moitié du déficit, les autres collectivités devant assumer l’autre partie. En fait Stéphane Alvarez formule l’espoir de pouvoir bénéficier de la visibilité qu’apporterait une convention triennale, laquelle devrait suivre l’audit qui est en cours et qui concerne quatre théatre bordelais. Il ajoute cependant: »il faut que le futur maire de Bordeaux s’engage à ce que notre théatre ne ferme pas ».Il l’a dit à Alain Rousset qui a utilisé la salle pour une de ses réunions publiques. Car le temps presse. Si les soutiens ne viennent pas, le Pont Tournant n’aura d’autre choix, dans quelques mois, que la fermeture.
Notre photo:Stéphane Alvarez (Ph Aqui)
Gilbert Garrouty