Tandis que le Préfet déclarait s’être emparé du problème des Sahraouis en juillet dernier, la situation restait toujours compliquée pour les quelque 200 réfugiés qui ont, depuis leur départ du campement de fortune situé sous le pont Saint-Jean, installé un nouveau camp Quai de la Souys, sur la rive droite de Bordeaux. Dans un communiqué, ils ont affirmé avoir reçu une menace d’expulsion pour ce lundi dès 6h30. Cette ordonnance d’évacuation, prononcée par le Tribunal de Grande Instance de Bordeaux à la demande de Bordeaux Métropole (propriétaire du terrain sur lequel ils sont installés) a eu raison de la volonté de rester d’un grand nombre d’entre eux, qui ont préféré dormir en dehors du camp et se disperser. La visite d’un huissier, venu constater l’occupation des lieux, menaçait clairement d’une expulsion proche.
Sur les quelques 200 réfugiés restants (leur nombre varie), une liste de 57 personnes avait été établie dans le courant de l’été pour être logées temporairement dans le centre d’accueil de nuit de Pessac géré par Emmaüs. Au final, seules 27 places auraient été trouvées, et 24 y auraient fait un bref passage, avant de revenir manger sur le camp selon le collectif d’associations qui ont relayé leur situation dans les médias (Cimade, Asti et Ligue des droits de l’homme). La situation des Sahraouis a également mobilisé des étudiants qui ont relayé la menace d’expulsion sur les réseaux sociaux. Plusieurs résidents, entrés par l’Espagne et déclarés sous le statut de réfugiés, ont déjà été renvoyés vers Madrid il y a quelques jours.
Des menaces opportunes ? Pour Rosa Ould Ameziane, l’une des portes-paroles de la LDH, cette menace d’expulsion intervient principalement pour deux raisons. « D’abord, elle surgit une dizaine de jours avant la trève hivernale, qui doit débuter le 15 octobre. Avant ça, l’inauguration du parc des angéliques est prévue en grande pompe le 10 octobre. Il ne faudrait pas que ça fasse tache déclare-t-il … Ils jouent toujours au jeu du chat et de la souris, certains vont s’installer ailleurs. On leur a fourni une organisation à peu près acceptable : de l’eau, une douche, un WC pour 200 personnes… On essaye aussi de maintenir le lien social en organisant des réunions au camp tous les mardis soir. Mais les Sahraouis sont autonomes. Ils acceptent les aides extérieures, mais ne demandent pas la charité publique », a précisé la porte-parole. Les Sahraouis sont donc toujours dans l’attente d’une éventuelle intervention des forces de l’ordre. « La préfecture doit proposer un hébergement, ça fait partie de la législation sur le logement opposable. Sinon, ils seront hors-la-loi et nous n’hésiterons pas à faire intervenir la justice ». Certains d’entre eux ont leurs papiers, d’autres sont toujours en attente de leur carte de résidents. Mais les Sahraouis seraient, selon les informations de la LDH, parmi les réfugiés à avoir le plus fort taux de réponse positive sur le droit d’asile (pour une moyenne nationale toujours fluctuante entre 20 et 25%).
Si la situation pourrait évoluer en leur faveur dans les prochains jours, beaucoup d’entre eux sont partis du campement de tentes installé quai de la Souys qui prenait peu à peu, lui aussi, des airs de bidonville. En France en 2014, on comptait 25 410 places en CADA (Centre d’accueil des demandeurs d’asile) gérées par l’Ofpra (Office français pour la protection des réfugiés et apatrides). Le gouvernement, qui avait lancé l’an dernier la construction de 5000 places supplémentaires, promet toujours 10 500 places de plus d’ici à la fin de l’année 2015. Mais même en additionnant ces chiffres, la somme ne suffirait pas à loger tous les demandeurs d’asile : ils étaient près de 65 000 rien qu’en 2014.