La main sous le menton, aucun détail n’échappe à l’homme aux cheveux blancs. Quatre acteurs interprètent une vingtaine de personnages. Les comédiens chantent, dansent, jouent aux marionnettistes. Guy Suire orchestre. Le théâtre est pour lui « un travail artisanal » comparable à la poterie, une de ses autres passions.
Et le théâtre, c’est toute sa vie. A 63 ans, cet ancien journaliste à France Culture et à France Inter, réalisateur à ses heures, se souvient du « déclic » : « J’avais 14 ou 15 ans quand j’ai lu La Cantatrice Chauve de Ionesco. Cette rencontre a été déterminante pour moi. Ensuite mes copains allaient voir les Beatles, moi j’allais au théâtre. » Quarante ans plus tard, c’est en défenseur d’un art populaire qu’il se pose. Une remarque sur le poncho des Incas, personnages du spectacle, puis il reprend : « Je préfère plaire au public qu’aux experts, ceux qui distribuent les subventions. » Et de confier, un sourire en coin : « Le café-théâtre c’est un peu le tiers théâtre voire le quart théâtrecomme on parle de tiers monde et de quart monde».
Des difficultés qui expliquent, selon lui, son acharnement. Il avoue se sentir parfois « las ». Sentiment vite balayé par l’incertitude dans laquelle il se trouve avant chaque spectacle, son moment préféré. « Jouer c’est faire le gamin, retrouver le plaisir de l’enfance. Et je n’ai pas envie de m’assagir. » Les yeux brillants, il raconte Yolande Moreau, la comédienne des Deschiens, sur la scène de l’Onyx et l’effervescence des soirs de centième.
Un « oiseau curieux »
Ce fou de théâtre aime à se définir comme un « oiseaux curieux ». Le décorateur revient avec la barbe du roi de Patagonie. Le héros du spectacle, est un peu comme son créateur : un Don Quichotte qui chevauche après quelques chimères. « Maintenant je cours à la vitesse de mon âge », lâche Guy Suire. Il peine à définir son genre, tantôt satirique, comme dans trois pièces critiquant les magazines féminins, tantôt poétique parfois paillard. Il s’inspire très souvent de légendes locales : Antoine de Tounens, le roi de Patagonie, était le fils d’un laboureur du Périgord. Ces autres références : les classiques et notamment Voltaire et ses Correspondances, « une leçon de lucidité », rapelle-t-il.
La retraite, il l’envisage. Après un spectacle qui aura séduit. Elle lui permettra de voyager et de publier son encyclopédie sur le cinéma et la tauromachie. Mais, bien sûr, lorsqu’il l’aura décidé.
Le roi de Patagonie, café-théâtre de l’Onyx, 11 rue Fernand Philippart, 33 000 Bordeaux, du 1er au 30 mars 2007 les jeudis, vendredis et samedis. 05 56 44 26 12.