« Gardons notre optimisme pour des jours meilleurs », si elle n’aura pas été la phase clé de cette cérémonie de vœux conjoints, aura en tout cas eu le mérite d’être ironiquement celle qui l’aura clôturée. Ce vendredi 10 janvier, le maire de Bordeaux Nicolas Florian et le président de la métropole (et maire du Bouscat) Patrick Bobet s’y sont mis à deux pour prononcer les derniers vœux de la mandature actuelle placés, pour le premier, sous le signe de « l’harmonisation, du partage et de l’équilibre. Nous sommes dans la phase de la métropole archipel, la troisième phase de notre regroupement intercommunal, qui nous pousse à un maintien de la cogestion afin de renforcer les villes au sein d’une même entité. Notre métropole ne s’arrête pas à nos simples frontières, il faut continuer à travailler à l’échelle de l’aire urbaine », a ainsi affirmé Nicolas Florian sans changer de costume. « Nous ne sortirons pas de cette crise sans dialogue. 2020 doit être l’année des 3M : mobilité, maîtrise foncière et mutualisation« , a, dans un discours plus pragmatique que son homologue, souligné Patrick Bobet.
Wagon chargé
Cette séquence dédiée à la presse a été l’occasion de faire quelques annonces et beaucoup de rappels de calendrier. La première est d’envergure nationale : le 7 janvier dernier (jour anniversaire de l’attaque terroriste dans les locaux de Charlie Hebdo), le ministre de la Culture Franck Riester a annoncé la création d’une maison du dessin de presse et du dessin satirique. Ce vendredi, le maire de Bordeaux a annoncé que la ville s’était portée candidate, par l’intermédiaire d’un courrier signé de sa main et de celle du président de la métropole, adressé au Ministère de la Culture, pour accueillir ce bâtiment. En guise d’arguments, la lettre énonce sa proximité avec Angoulême et son festival de BD et la spécialité autour du dessin de presse humoristique de Saint-Juste-Le-Martel. Si la candidature est retenue, le bâtiment pourrait se situer rue du Loup, au sein de l’Hôtel de Ragueneau (sur 1700 mètres carrés).
Comme avait l’habitude de le faire Alain Juppé, Patrick Bobet a rapidement énoncé quelques grands chantiers à venir en termes de transports, l’un des points de tension politiques majeurs de ces derniers mois : extension de la ligne A du tram vers l’aéroport début 2022, début de l’enquête publique cet automne pour l’extension de la ligne D vers Saint-Médard (qui sera inaugurée jusqu’à Eysines le 29 février prochain), RER métropolitain qui bénéficiera de son premier ouvrage en 2020 avec la réouverture de la halte du Bouscat (avant celle de la gare de la Médoquine à Talence en 2023), accord de principe de la préfecture pour le lancement d’une étude sur un barreau autoroutier entre Mussidan et Langon, duplication de la ligne de cars express entre Créon et Bordeaux (environ 800 passagers par jour), cette fois ci vers Blaye via Saint-André de Cubzac… les transports ne manquent donc pas d’entrées, même sans y ajouter le redémarrage de celui du pont Simone Veil, recalé pour 2024 et la nouvelle Déclaration d’Utilité Publique pour le BHNS reliant Bordeaux à Saint-Aubin-de-Médoc qui après plusieurs déconvenues juridiques est envisagée pour fin 2020.
Du côté de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire, c’est le discours de Nicolas Florian qui a marqué le pas. Si, l’an dernier, de nombreuses voix de maires s’étaient élevées pour prôner la fin de l’étalement urbain et le souhait de densifier les communes, le maire de Bordeaux a affirmé avoir « été trop loin dans cette logique de lutte contre l’étalement urbain. Ce que je retiens de l’épisode des gilets jaunes, c’est l’expression d’une fracture territoriale. Nous avons trop poussé les feux sur la lutte contre l’étalement urbain et la densification, ça a aussi amené une forme de désertification en périphérie. Je souhaite que l’on corrige ça dans les années qui viennent. Ça va au-delà du partenariat qu’on peut tisser avec tel ou tel territoire, c’est plutôt une logique de plus grande porosité et de meilleur équilibre du développement, qu’on puisse vivre et travailler dans un secteur sans obligation de s’y concentrer ».
Coopérations
Dans la même logique d’apaisement, Patrick Bobet est revenu sur les doutes récemment émis par le président du Conseil départemental, Jean-Luc Gleyze, concernant le nouvel accord passé avec Véolia concernant la gestion des déchets sur la métropole qui aurait, selon ce dernier, pénalisé les territoires périphériques.
« Nous avions fait la demande à Suez et Véolia de faire en sorte de ne pas augmenter leur tarif et même, si possible, de les diminuer. Les deux sociétés nous ont répondu avec des chiffres très inférieurs à ceux que nous avions espéré. Nous avons financé tout l’investissement sur les incinérateurs. Pour ce qui est des autres territoires, nous n’avons aucun moyen juridique d’interférer dans cette demande là tout à fait cloisonnée. Ce qui est demandé aux territoires extérieurs tient compte de leur faculté à apporter leurs déchets dans des unités de valorisation énergétique plutôt que de les enfouir. La TGAP (Taxe Générale sur les Activités Polluantes) augmente de manière très importante, les tarifs de Veolia tiennent compte de cette augmentation. Nous sommes désolés qu’on oppose la « bonne affaire » de la métropole à celle des autres territoires, mais il faut arrêter de dire que la métropole ne rayonne pas sur les autres territoires. On n’est pas opposés au département. Nous finançons vingt millions d’euros à l’Agence de l’Eau Adour-Garonne pour aider les territoires extérieurs, nous aidons à hauteur de 300 000 euros par an pendant quatre ans la déchetterie de Sainte-Eulalie ».
« J’appelle de mes vœux la création d’organes dédiés à la mobilité et à l’aménagement du territoire qui mettent autour de la table la région, le département et les intercommunalités. On est capables de signer des contrats de co-développement, j’espère qu’on sera capables de signer officiellement une contractualisation avec le département. Il faut qu’il y ait d’abord une phase de diagnostic, de partage d’expérience et d’objectifs, chacun dans ses compétences », a ajouté le maire de Bordeaux en plaidant pour la création d’un organe dédié aux mobilités qui viendrait affiner la mission du syndicat mixte régional.
Le futur des OIM
En matières économiques, enfin, le président de la métropole a de nouveau salué un objectif « tout à fait tenable » : celui de 100 000 nouveaux emplois en 2030, « sachant que les chiffres de 2018 sont à 14 000 et que ceux de 2019 sont sensiblement similaires mais pas encore tout à fait arrêtés. Au rayon des nouveautés, on peut souligner le plan pluriannuel de l’OIM Innocampus validé dans les prochaines semaines, l’extension de l’OIM Aéroparc vers une surface totale de 3300 hectares (dont l’agrandissement des sites de Dassault Aviation et de Sabena Technics constituent le gros morceau) et une réunion des élus en bureau fin janvier pour la création d’une nouvelle OIM sur la rive droite.
Questionné, Patrick Bobet a simplement souligné les objectifs de cette première réunion formelle pour préfigurer un projet d’envergure pour la rive droite (dont le maire de Cenon Jean-François Egron parlait il y a peu) : ‘ »nous allons définir la stratégie, la thématique, le périmètre de la troisième OIM de la métropole. Les maires sont demandeurs. Nous avons pour l’instant deux propositions : la première intitulée » Garonne » et la seconde, plus ambitieuse et innovante qui s’appuierait sur des technologies de pointe. Nous en débattrons en bureau le 23 janvier ». Enfin, les deux élus ont évoqué la signature prochaine d’un protocole d’accord avec l’écosystème Darwin. « Nous avons réinstallé un nouveau climat entre l’aménageur et les Darwiniens. Ça s’est traduit par des décisions d’engagement réciproques sur l’occupation du domaine public et des clauses techniques aménagées », a ajouté Nicolas Florian. Voilà donc de quoi occuper assez largement les prochains mois…