Le centre-ville de Pau se mourait. Il fallait agir. En 25 ans, la ville a vu sa population diminuer de 6,1%, ce qui représente 12% de logements vacants. Les Palois fuyaient le centre-ville pour aller s’installer en périphérie. Ce qui ne les empêchait pas de venir en ville, pour travailler. Résultat : une hausse des accidents lors des déplacements de l’extérieur vers Pau et un centre-ville « sinistré » aux dires des commerçants.
Une révolution s’imposait, question de survie. Ou comment faire pour que le centre-ville redevienne vraiment un lieu de vie. André Labarrère, aidé de son directeur de l’aménagement et de l’urbanisme, Jean-Pierre Bombaut, a opté pour un centre piéton, sur le modèle de beaucoup de villes en France. Pour plus de convivialité. Pour limiter les voitures et leurs nuisances. Les bus devaient prendre le relais. Des parkings rassurer ceux qui tiennent à la liberté de mouvement qu’offre la voiture. Un projet ambitieux. Deux ans après le début des travaux, qu’en est-il de cette volonté de rendre la ville aux piétons ?
La galère des travaux
La galère des travaux et le système « D », les Palois l’expérimentent tous les jours. S’ils se sont habitués au bruit et autres désagréments quotidiens, les commerçants n’aspirent qu’à une seule chose, la fin des travaux. « Il faut être optimiste. C’est un mauvais cap à passer. Et le plus dur est fait », se rassure Christian Bello, responsable de l’agence Verdié voyages, 7 place Clémenceau. Pour les commerçants, l’année 2006 a été un vrai cauchemar : marteaux piqueurs, poussière et vacarme ont fait fuir les clients. La situation s’améliore avec l’avancée des travaux. Surtout, l’ouverture du Palais des Pyrénées, en septembre 2006, a attiré les clients, curieux, et fait repartir la fréquentation.
François Authier, responsable du magasin Nature et Découvertes, de l’autre côté de la place, dresse le même constat, chiffres à l’appui : une baisse de son chiffre d’affaire de 5% l’année passée, compensée par une hausse de la fréquentation de 30% au dernier trimestre. Il confirme l’effet « Palais des Pyrénées » puisque 75% de ces nouveaux clients venaient dans son magasin pour la première fois.
Des visites en ville qui, comme les livraisons, prennent l’allure de parcours du combattant. La rue du Maréchal Joffre à sens unique un jour, le lendemain à double sens. « L’effet du changement du plan de circulation a dérouté tout le monde. Il a été plus préjudiciable que les travaux eux-mêmes », affirme le patron d’Interflora, Guy Labaste. Si les Palois ont du mal à s’y retrouver, pour les acheteurs venus de l’extérieur, c’est encore pire. Difficile d’atteindre le centre-ville puis d’en sortir.
Difficile de se garer. « Trouver un parking quand on arrive du nord de la ville, c’est compliqué », s’exclame Raymond Casau, propriétaire du restaurant Chez Pierre, rue Louis Barthou. Le tout nouveau parking, sous la place Clémenceau, avec ses 400 places, est accueillant, mais encore faut-il y arriver.
« Etre mieux informé par la mairie »
Comme dans toutes les villes qui conduisent des travaux de cette envergure, c’est la municipalité qui est en première ligne. « Etre mieux informé par la mairie », tel est le souhait de François Authier et de beaucoup d’autres commerçants.
« J’attends toujours qu’on me communique le projet concret et définitif d’aménagement du centre-ville», explique Thierry Samuel, le président de l’association « Pau Commerce ». Il déplore un manque de clarté concernant le choix des rues piétonnes. Une de ses autres préoccupations est la cohabitation des voitures et des bus. Bannir les automobilistes et aménager les circuits des bus pour les remplacer, sans oublier les parkings nécessaires à l’extérieur du centre-ville : c’est une première solution. Conserver les voitures, leur offrir un stationnement, sous la Place Clémenceau, mais leur interdire certaines rues : c’est la seconde. Ce qui ressort, pour Thierry Samuel, c’est un « flou artistique ».
Même impression chez les chauffeurs de bus. Des changements de circuits, des aberrations, comme les voitures, rue Jean Monnet, qui ont la possibilité de tourner à droite, pour prendre la rue Emile Guichenné, coupant ainsi la voie bus. Des incohérences qui se soldent par des retards sur certaines lignes, comme la numéro huit.« On ne donne pas une image de sérieux. On suggère des améliorations mais on se demande si on est écouté. Au final, on ne fait que subir », s’exaspère Thierry Vecchiato, un chauffeur. A cela s’ajoute un stationnement anarchique : des arrêts minutes qui s’éternisent, des arrêts en double file qui se multiplient. L’employé de la STAP (Société des transports de l’agglomération paloise) explique : « Le ton monte, on entre dans un système de conflits. » Et c’est l’attractivité de la ville qui en pâtit.
Tous partagent cette même crainte : que les consommateurs continuent à délaisser le centre-ville pour les grandes surfaces, plus simples d’accès et aux parkings gratuits. Mais tous sont prêts à séduire et fidéliser la nouvelle clientèle drainée par le Palais des Pyrénées. Le centre-ville rénové, la place Clémenceau devenue espace de vie, le nouveau défi sera, comme le souligne Thierry Samuel, de proposer des animations.
Notre photo : la place Clémenceau en travaux/ le Palais des Pyrénées.