À Mérignac, Dassault continue de grandir


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Temps de lecture 5 min

Publication PUBLIÉ LE 14/05/2019 PAR Romain Béteille

Ce lundi, l’entreprise Dassault Aviation a donc posé la première pierre d’un nouveau bâtiment tertiaire sur son site de Mérignac. Ce chantier de construction, dont le résultat sera un bâtiment de 25 800 mètres carrés sur quatre niveaux et aura une capacité totale de 1500 postes de travail, répartis en 24 espaces collaboratifs. Il fait surtout partie de la nouvelle stratégie de transformation du groupe (l’entreprise d’origine ayant été fondée en 1907 et reprise en 1951 par Marcel Dassault et Henry Potez), baptisée « Piloter notre avenir », conçue pour répondre à une concurrence de plus en plus agressive, notamment américaine et canadienne. Lancée en 2016, cette « transformation » prévoit plusieurs chantiers importants dont une volonté de regrouper les équipes chargées de la conception et celles dédiées à la production des avions.

En présence de nombreux élus locaux venus poser la « première pierre » (en fait, une reconstitution en maquette du futur bâtiment qui sera surmonté de 4000 mètres carrés de panneaux photovoltaïques et de toitures végétalisées), le PDG du groupe Eric Trappier, qui avait déjà inauguré en 2015 le centre Dassault Falcon Service dédié à la maintenance aéronautique, est brièvement revenu sur cette nouvelle stratégie industrielle. Ainsi, le site de Martignas se dotera prochainement d’une « infrastructure dédiée qui recevra les activités pyrotechniques actuellement basées à Poitiers et à Argenteuil. L’usine de Poitiers, elle, va concentrer les activités emports et réparations. Nous avons également lancé un programme d’agrandissement pour le site de Biarritz », a souligné le PDG.

Nouveaux recrutements à prévoir

« L’antenne de Mérignac, pour sa part, sert depuis septembre d’importante base de transfert des laboratoires de développement technologique et industriel basés à Argenteuil. Cette nouvelle localisation de nos laboratoires, plus près des avions, favorise les synergies entre la conception, le développement, l’industrialisation et le soutien ». Des équipes de soutien militaire et du support FALCON (basées à Saint-Cloud et au Bourget), s’installent également au compte-goutte à Mérignac. Enfin, le bâtiment inauguré ce mardi est censé accueillir (sur une période de transfert qui devrait s’étaler jusqu’en 2023) les équipes d’étude, de développement et de soutien déjà installées à Mérignac et celles appelées à être transférées de Saint-Cloud. Le bâtiment comportera également un « Virtual Reality Center » et un « Immersive Reality Center », parties intégrantes des nouvelles ambitions digitales du groupe, via notamment le développement d’une plate-forme numérique interne (3DExperience), devant aider à baisser ses coûts de production. 

Les nouvelles recrues seront donc à deux pas des Rafale et des Falcon, assemblés et testés à Mérignac, qui tend clairement à devenir le pôle majeur de l’entreprise, à un trottoir à peine du groupe Thalès. Les sites desquels les transferts vont être opérés n’ont pas prévu de disparaître, selon le PDG de Dassault pour, dit-on, « rationaliser son emprunte industrielle » face à la concurrence notable de poids lourds comme Bombardier et Gulfstream bénéficiant d’une stratégie de conception géographiquement bien plus concentrée. Économiquement, même si le groupe est toujours dans le vert et qu’il n’a licencié aucun employé, son effectif (comme celui de ses concurrents), a tout de même fondu depuis 2008, passant de 12 438 à 11 400 salariés. Ce dernier remonte pourtant en 2018, comme l’a souligné Éric Trappier, avec une embauche de 200 nouveaux salariés en 2018 en Nouvelle-Aquitaine, et prévoit au moins le même effort pour 2019.

Deux points noirs

Le projet d’extension n’a pas non plus évité l’enquête publique. Cette dernière a bien eu lieu et s’est terminée en juillet. Elle a mis en avant deux réserves notables, au premier rang desquels un impact sur l’environnement et le milieu naturel. En guise de réponse, le groupe Dassault avait alors précisé que « les contraintes de production nécessitent de réserver une zone foncière de 6 ha pour construire un bâtiment de grande envergure capable d’accueillir des avions Falcon et de produire ceux-ci à des cadences élevées, ainsi qu’un taxiway à proximité pour manœuvrer les avions et les acheminer jusqu’à l’accès aéroport (…) il n’a pas été possible d’éviter la destruction de zones humides et localiser le projet autrement, mais l’ensemble des zones humides détruites seront compensées sur le terrain de Sabatey ».

Le deuxième souci, plus local, concerne la question des transports et des dessertes d’un Aéroparc (au sein duquel le projet TARMAC est toujours sur les rails) très congestionné, notamment aux heures de pointe. Interrogé sur ce point, le maire de Mérignac, Alain Anziani, a précisé que le prolongement du tramway vers l’aéroport (prévu pour 2022) devrait faire une partie du travail et que la mise en place d’un bus entre l’aéroport et Thalès pourrait elle aussi contribuer à résoudre le problème, de même que la construction de nouveaux hangars à vélos près des stations de tramway ou le déploiement d’un nouveau réseau de trotinettes électriques. Quant aux efforts des entreprises, le fameux « Plan de Déplacement des Entreprises », bien qu’actif, « n’est pas à l’ambition nécessaire » pour l’élu, qui dit « ne pas franchement croire au co-voiturage en ville ». Pour ce qui est de la liaison avec le site de Dassault à Martignas, un projet de bus partant de Martignas vers Mérignac pourrait être acté avant la fin de l’année par la métropole.

« Un cycle long »

Dans un discours que l’on pourrait qualifier d’enflammé, du moins pour l’industrie française, Eric Trappier a souligné « le rôle essentiel de l’industrie pour un pays dans la création de valeur et dans la défense de l’emploi. Sans industrie forte, il n’y a pas de croissance durable, pas de maîtrise des technologies essentielles à notre prospérité économique, à nos exportations et à nos emplois », a-t-il rappelé tout en se félicitant du récent lancement du programme SCAF (Système de Combat Aérien du Futur) en février dernier et issu de longues discussions entre la France et l’Allemagne. « Nous sommes une industrie à cycle long, il était urgent de donner cette impulsion qui doit nous permettre de préparer l’avenir dans le domaine de l’aviation de combat et qui se traduira naturellement par la poursuite du développement de nos compétences ainsi que par un partage d’activités entre la France et l’Allemagne ». Pour Alain Anziani, le maintien de Dassault sur Mérignac et la « création d’emplois qu’elle amène est une chance pour le territoire ». Gageons qu’il saura leur indiquer la route sans trop de bouchons à la sortie. Les travaux doivent s’achever fin 2020, avant une mise en service du bâtiment en janvier 2021. 

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