Grand débat : les artisans apportent leur « pierre »


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Temps de lecture 4 min

Publication PUBLIÉ LE 05/04/2019 PAR Romain Béteille

Heure de vérité

Ce lundi sera la première heure de vérité pour le grand débat national : après une « campagne » démarrée en janvier dernier, les premières restitutions sont attendues en début de semaine, avant une déclaration du Premier ministre à la tribune de l’Assemblée et un débat sans vote, qui précèdera des premières décisions à la mi-avril au plus tôt. En parallèle, les évènements s’enchaînent du côté des collectivités territoriales de Nouvelle-Aquitaine (comme dans d’autres régions). Ce mercredi, elles ont voté la mise en place d’un fonds de soutien de 2,6 millions d’euros à destination des commerçants et artisans touchés par le mouvement des gilets jaunes. Les pertes d’activité de ces derniers ont été estimées (selon différents sondages notamment issus des chambres consulaires) entre 20 et 50% les samedis dans certains secteur à Bordeaux et en Gironde, environ 20% pour la Nouvelle-Aquitaine. Si les critères d’attribution de ces aides sont déjà discutées, les professionnels ont jusqu’au 30 juin pour déposer leur dossier. « Le gouvernement a annoncé une extension de mesures d’aides, mais rien en ce qui concerne la perte du chiffre d’affaire au niveau national », déplore-t-on du côté de la chambre consulaire. 

Le gang des 14

Pour autant, le climat incertain n’a pas manqué de faire réagir le réseau national des Chambres de Métiers et de l’Artisanat. Ce jeudi, une réunion s’est tenue à l’Institut des Métiers et de l’Artisanat, en présence notamment du Président de CMA France, Bernard Stalter, qui n’a pas manqué d’exprimer à de multiples reprises son exaspération face aux pertes financières et aux différentes remontées de terrain des artisans et commerçants nationaux. « Il faut que ça cesse, les artisans voient rouge », a-t-il répliqué lors d’un échange avec la presse. Les chambres nationales ont, depuis le 24 janvier, organisé une trentaine de grands débats sur tout le territoire.

En sont ressorties quatorze « mesures prioritaires pour permettre aux artisans de vivre de travailler dignement ». Parmi ces mesures, on trouve notamment la nécessité d’une « protection systématique du patrimoine personnel du chef d’entreprise individuelle » via la création d’un statut unique et progressif, la fin de l’impôt sur les bénéfices réinvestis dans les entreprises soumises à l’impôt sur le revenu (soit environ 50% des 1,3 millions d’artisans en France) ou l’augmentation du nombre d’entreprises élligibles à la prime d’activité (avec un plafond réhaussé de 32 à 70 000 euros). « Aujourd’hui, il existe un acte notarié permettant la protection des biens, ce sont des mécanismes qui protègent le patrimoine. Mais il faudrait garantir un traitement équitable aux micro-entreprises avec un statut limité dans le temps. Une micro-entreprise, ça n’embauche pas, ça ne forme pas et ça ne valide pas ses trimestres. On est assis sur une bombe sociale », n’a pas hésité à assurer le président de CMA France. Dans les faits, un artisan sur dix gagne moins de 480 euros, un sur quatre moins de 1100 euros et la moitié moins de 2290 euros.

Doléances et espérances

Si elles paraissent clairement faire figure d’un cahier de doléances parmi beaucoup d’autres, certaines de ces mesures sont plus concrètes que d’autres. C’est notamment le cas pour ce qui est de la revitalisation des coeurs de ville : les Chambres des métiers souhaitent une extension des zones de redynamisation rurales, un plan national en faveur du maintien « et du renforcement de l’artisanat de proximité dans les centres-bourgs » (« sans y intégrer les Carrefour Market… ») et un « dispositif d’aide à la modernisation des locaux et des équipements des entreprises artisanales ». Surtout, les responsables CMA parlent d’un climat délétère qui s’accentue, avec « des prises de décision se reportent, des contrats qui étaient plus ou moins signés et des clients qui décident d’attendre. La complexité, c’est qu’on ne peut pas remplacer sur le moment ce qui est perdu. On refuse de licencier des gens qu’on a formés et qui sont polyvalents, on est pris dans un étau qu’on n’arrive pas à surmonter par rapport à la question du licenciement », affirme pour sa part Nathalie Gauthier, présidente de la CMA des Deux-Sèvres.

L’autre plainte, c’est celle de ne pas être entendu. « Nous représentons 30% de l’Économie française, pourquoi Mr Macron ne ferait pas avec nous ce qu’il a fait en allant rencontrer les maires, les enfants ou d’autres corps de métiers ? », dénonce ainsi Bernard Stalter. Se considérant comme particulièrement impactés économiquement, les représentants des artisans redoutent une deuxième lame dans les mois qui viennent, même si les chiffres de chômage partiel sont encore aujourd’hui largement discutables. « L’argent, c’est une chose, mais si l’on ne créé pas derrière ce choc de confiance, ce plan anti-morosité, on met juste un sparadrap. Si on ne travaille pas tous ensemble sur cette vision positive de la profession, on passera à côté de quelque chose ». La série de proposition des chambres de l’artisanat devra attendre, comme toutes les autres contributions, le déclic d’une série de mesures annoncées à de multiples reprises comme « concrètes », mais qui suscitent encore un vif scepticisme, y compris dans l’hémicycle où les restitutions ont récemment fait l’objet d’un éclairage clairsemé. Les attentes, elles, ne font en tout cas l’objet d’aucun doute. 

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