Fanny Salmeron, nous dit son éditeur, a 30 ans. ” Elle vit à Paris, avec un chat étrange qui porte le nom d’une chanson de Björk… son travail à plein temps c’est de tomber amoureuse. ” A la lire, on le croît, car pour tomber amoureux il faut voir et croire. Fanny Salmeron voit, au delà de l’indifférence, ce voile bleu qui masque parfois la vérité des choses. Elle écrit et fait dire à Eloïse, devenue femme, “… mon coeur tu auras beau griffer loin profond me faire du mal, mon coeur tu ne le trouveras pas il est trop petit je crois même qu’il a disparu.”; mais Fanny, elle le trouve, elle. Elle griffe, elle égratigne, mais elle le trouve. Son écriture a tout d’un ciel d’orage, quand au loin le combat gronde, quand soudain, en un éclair, la nuit devient blanche, et quand enfin l’univers se déchire en un vacarme de tôle qu’on défonce. Et l’histoire qu’elle nous conte, n’a rien d’une histoire simple. Elle se construit au rythme des confessions contenues d’Eloïse, une Eloïse dont le destin emprisonne soudain un éclat d’enfance comme un dernier éclat de rire qui se meurt dans un sanglot.
Fanny Salmeron livre là un texte qui nous dit que les gens bizarres ont quelque chose qui crépite au fond du coeur. C’est important, aussi, les textes comme ça, car ils nous montrent enfin ce qu’on ne veut pas voir. Comme Eloïse quand elle lit des destins dans les ciels tourmentés. Eloïse qui dit d’elle-même ” je ne suis pas une fille bien”, et on comprend aussitôt que les choses ne sont pas si simples. Non jamais.
” Le travail des nuages”, c’est l’histoire des destins cahotiques, du long travail du deuil, quand les amours, les parents, la vie, se réunissent en un ciel où les nuages, indispensables, sculptent ce que sera demain. Il ne faut pas avoir peur des nuages, c’est là la morale de l’histoire: car d’eux naissent les ombres d’où jaillit, malgré tout, l’incandescence d’une lumière que l’on n’attendait plus.
Photo Stéphane Million éditeur, tous droits réservés.
Anne DUPREZ
“Le travail des nuages”, Fanny Salmeron. Stéphane Million éditeur, août 2011. 15€. Fanny Salmeron écrit dans la revue “Bordel”, et a publié un remarquable premier roman “Si peu d’endroits confortables”.